- Les activités de travail au plateau des Capucins
L'atelier des machines en 1986
L'atelier des machines en 1986
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L'atelier des machines en 1986
Le personnel de l'atelier des machines était occupé à manœuvrer des machines outils aussi nombreuses que diverses dont certaines étaient particulièrement notamment très imposantes.
Il s'agissait de perceuses, de mortaiseuses, tours verticaux et parallèles, chanfreineuses, raboteuses taraudeuses. Les éléments, préformés à la fonderie ou à la chaudronnerie (dans le cas de pièces de chaudières) étaient usinés à la dimension précise et nécessaire pour entrer précisément dans la composition de la machinerie du navire en construction ou en réparation.
Ils y étaient percés avec des forets souvent de dimension exceptionnelle, tournés sur des tours gigantesques et souvent uniques tel que le tour Somua de 22 mètres servant à usiner les arbres d'hélices, rabotés sur des épaisseurs que ne permettaient pas les équipements habituels, polis au micron près sur des meules afin d'éviter la moindre striure dans la mécanique...Ils étaient donc précisément ajustés pour la place et le rôle qu'ils devaient occuper dans la machinerie du navire.
A l'atelier des machines, sur les tours automatiques, le personnel était également chargé de la confection des munitions, ce qui était redouté de la part du personnel employé aux Capucins, car ça représentait un travail en série, donc un travail très répétitif. Des pièces de taille plus modeste étaient également usinées dans les ateliers qui confectionnaient jusqu'aux rivets, clous, écrous et boulons.
« Il occupe les deux halles de l'ajustage et du montage ainsi que les bâtiments annexes
contigus, soit une superficie d'un hectare vingt. A leur sortie des forges ou de la fonderie, les
pièces de machines préalablement tracées à la halle de montage sont envoyées à la halle
d'ajustage où elles sont tournées, burinées, rabotées en un mot ajustées suivant les besoins.
Une fois que tous les organes d'une machine ont été ainsi préparés isolément, il faut pour
vérifier faire le montage préalable de la machine avant de l'envoyer sur le navire » (P. Levot)
« Quand il s'agit d'usinage, l'intervention de l'ouvrier est réduite au minimum, une fois la
machine réglée d'après les informations portées par le bureau des fabrications sur la fiche de
travail, l'ouvrier n'a plus qu'un rôle de surveillance. Pour les travaux de tournage, rabotage,
alésage, l'ouvrier à condition d'être convenablement placé et pas trop éclaboussé par
l'arrosage n'en ressent pas de très grande fatigue supplémentaire, (...) le problème porte
plutôt sur l'emploi des machines que sur l'activité des hommes »55
Au niveau de la halle d'ajustage, nous tenions à préciser qu'au moment de la construction des
ateliers il y avait deux étages, de plus d'après un entretien, le sol était en pavés de bois.
55 Serge Travers, Le statut du personnel ouvrier et le problème de la main d'oeuvre dans les arsenaux de la
Marine Française, (Thèse pour le doctorat, Université de Paris, Faculté de droits Paris, Les Presses modernes,
1935)
Plateau des capucins, collecte de mémoires, phase d'expérimentation,
Analyse et interprétation des témoignages oraux. CRBC.
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Alors l'atelier usinage ici, la particularité c'était que le sol était fait avec des pavés en bois,
parce que à l'atelier usinage vous aviez des copeaux des machines outils et les gens
travaillaient en sabots, , des pavés avec le fil du bois vertical pour que ce soit plus résistant.
L'atelier des machines (10000 m² de surface) était donc capable de réaliser tous les travaux de
mécanique, il était équipé de 200 machines outils, 14 tours dont 7 verticaux (diamètre admis 1
à 7 mètres) et 3 tours parallèles (entre pointes de 5 à 22 mètres). 8 aléseuses, (diamètre de
broche 90 et 200) et 5 raboteuses. Il y avait également d'autres machines :
17 fraiseuses, 14 rectifieuses, 4 mortaiseuses, 10 machines à tailler les engrenages, 5
perceuses radiales, une machine à brocher d'une puissance de dix tonnes, des perceuses, des
taraudeuses... ainsi que des matériels nécessaires aux travaux de précision effectués dans des
locaux conditionnés. Ces machines outils étaient desservies par 6 ponts roulants dont un de 40
tonnes. Au niveau du petit usinage, il y avait également 37 tours parallèles, 6 tours semi
automatiques, 8 tours automatiques, 6 tours à commande programme. Parmi les
machines outils étaient très remarquables du fait de leurs caractéristiques :
• Le tour horizontal à tourner les lignes d'arbres pouvant recevoir des pièces
de 22 mètres de long. 56
56 Toutes les photographies proviennent d'une brochure établie par la direction des constructions navales
Direction des Constructions et Armes Navales à Brest. †Atelier des machines sur le plateau des
Capucins, présentation du service : brochure. s.d Collection privée M. Leyer
Plateau des capucins, collecte de mémoires, phase d'expérimentation,
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Celui là c'est vraiment une particularité donc c'était
un tour sur lequel on usinait les arbres à porte d'hélices, c'est un gros cylindre en acier. Les
arbres allaient du moteur à l'hélice du bateau et puis il fallait les rectifier parce qu'ils étaient
usés, alors la première technique consistait d'abord à mettre l'arbre sur des tréteaux
spéciaux et de confectionner une douille en bronze, qu'on venait placer sur l'arbre mais bien
sûr, cette douille là ne se trouvait pas au bout d'arbre, mais se trouvait en général au milieu
de l'arbre. Alors donc, on fabriquait avec beaucoup de précision la douille. Comment mettre
une douille dessus donc on prenait la douille, on la fabriquait avec tous les coefficients de
dilatation et nous, au niveau technique, on faisait des hachures donc, cette pièce là, il fallait
la placer dessus, il y avait des couronnes avec des flammes. Cette douille là était placée sur
des chariots, et placée en bout d'arbre, imaginez un peu la valeur de la douille, en général
elle faisait 80, presque 1 cm de long donc il fallait la chauffer pour qu'elle se dilate. L'arbre
pour le moment, au lieu d'être sur le tour, il était à côté, et donc le problème c'était d'enfiler
cette douille là sur l'arbre. Une fois que tout était prêt, tout le monde se taisait bien sûr vue la
valeur de la douille et le chariot avançait et en sachant fort bien que si elle se refroidissait,
elle allait se contracter donc on avançait le chariot, on arrêtait le chauffage et bien sûr la
douille se rétractait et était à sa place, on la plaçait sur ce tour de 22 mètres là où on
exécutait donc l'usinage nécessaire.
Le tour horizontal pour l'arbre d'hélice, il est le seul à pouvoir le faire. Mais sur le tour
vertical, ça pouvait être des grosses pièces de forme carré, qui sortaient de l'ordinaire mais
où on avait besoin pour venir percer, aléser, faire des grands diamètres.
Montage et essai
d'une ligne
d'arbre
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Sous le tour de 22 mètres, il y avait un souterrain, un atelier souterrain, un magasin et donc,
quand nous sommes arrivés là en 48, on n'a pas eu de problèmes parce qu'on allait prendre
de l'outillage là dedans, c'était la problématique du caisson.
• Un tour vertical pouvant tourner des pièces de 7, 5 mètres de diamètre et de
3 mètres de haut
• Un tour à programme permettant l'exécution rapide d'usinages complexes
même pour des séries peu importantes
• Une machine à tailler les engrenages possédant un variateur à commande
électronique et pouvant tailler des roues dentées de 1,5 mètres de diamètre
• Une aléseuse ayant 5 mètres de course dans le sens horizontal et 4,5 mètres
dans le sens vertical
Le tour vertical de l'atelier des machines, 1968, collection privée M. Leyer
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Une machine à tailler les engrenages coniques, 1860
SHM Brest
Une aléseuse, DCN, années
1970
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SHM Brest, raboteuse, photo non datée
Une machine à tailler les engrenages, Années 1970, DCN
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Au niveau du personnel, d'après les entretiens, les effectifs devaient être compris entre cent
cinquante et deux cents personnes.
Il y avait une activité continue, il y avait des délais de commandes, elles ne travaillaient pas
au coup par coup.
Chacun avait sa machine. Ils pouvaient changer parce qu'ils étaient quand même polyvalents
plus ou moins. Mais normalement chacun avait sa machine et ils connaissaient bien leurs
bécanes.
La grande allée où se trouvaient les grosses machines outils était appelée « la nef des
seigneurs ».
Ce sont des anciens qui nous ont répété ça, c'étaient donc les gars qui travaillaient sur les
grosses machines. L'allée principale de l'atelier.
Il faut savoir que le fait de travailler sur les grosses machines outils était perçu comme une
reconnaissance sociale, ainsi les ouvriers ressentaient une certaine fierté à travailler sur ces
dernières.
DCN, raboteuse, Années 1970
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On commençait par le petit tour et puis au fur et à mesure du déroulement de carrière, quand
il y avait de la place sur d'autres machines plus importantes, à ce moment là on nous posait
la question avec notre chef d'atelier
« Est-ce que ça t'intéresse d'aller sur les aléseuses ? Ou bien sur les tours verticaux etc.»
On changeait de poste souvent pour ne pas rester toujours sur la même machine tout le temps.
Parce qu'il y en a qui l'ont fait. Ils commençaient sur un petit tour et comme ils se trouvaient
bien sur ce petit tour parallèle, ils restaient. Ils n'avaient pas de déroulement de carrière.
Tandis qu'en acceptant la mobilité, de lui, on disait « celui là, il a de l'ambition et au moins il
veut toucher un peu à tout. »
Il y avait beaucoup de machines, ce n'est pas du tout pareil que nous, ils avaient un temps
bien défini pour faire leur pièce donc il fallait tenir les temps.
Parce que là, on faisait tout, on faisait des arbres d'hélice, on ne peut plus faire des arbres
d'hélice, chez nous, on avait coutume de dire « chez nous, on répare les montres et on ferre
les chevaux » c'était tout le panel
J'étais impressionné surtout par la qualité, j'allais voir souvent des copains qui travaillaient
aux machines, alors les voir travailler aux tours, ça c'était impressionnant (...) mais ce
n'était pas celui là (tour Somua) qui m'impressionnait le plus, c'était gros, c'était énorme,
c'était majestueux, celui là, il tournait peu finalement, mais par contre les tours que les gars
manipulaient pour faire les pièces les plus courantes, la dextérité qu'ils déployaient et dont
ils faisaient preuve c'était assez extraordinaire. J'adorais les voir parce que là, il ne fallait
pas se tromper, c'était en chaîne parfois et ils faisaient des choses tout à fait ahurissantes de
qualité, de beauté physique, je veux dire, les choses qui sortaient de là, elles brillaient à la fin,
c'était, vous savez des billes. Les tourneurs, ça allait vite contrairement à ce qu'on racontait,
bien entendu, on n'était pas avec un pistolet dans le dos au boulot, ça aussi c'est une
différence avec l'entreprise privée mais cela étant dit, les mecs ne restaient pas le cul sur la
chaise à ne rien faire, ils ne jouaient pas aux cartes, les gars, ils bossaient et puis ils
bossaient bien en plus et donc la légende de dire qu'on ne foutait rien
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L'organisation du travail
Au niveau général, sous les ordres d'un ingénieur général du génie maritime la direction des
constructions était organisée comme suit :
• Un ensemble de services administratifs constitué en sous-direction sous les
ordres d'un ingénieur en chef du Génie maritime et traitant essentiellement
des problèmes d'approvisionnement courant et de stockage en magasin, des
questions de comptabilité, de l'administration du personnel (salaires,
pensions, mutations, affectations...)
• Un ensemble de sections techniques coordonnées par le directeur adjoint,
contrôlant les chantiers de construction neuve et de réparation des navires,
les questions relatives aux armes et aux équipements divers, les questions
d'infrastructure et différents travaux d'ateliers.
Ces deux services employaient à eux seuls 80% des effectifs totaux, à côté il y avait
également la pyrotechnie Saint Nicolas et le service de la guerre des mines ainsi que l'école
de formation technique et le groupe des écoles techniques de la marine dirigé par un
ingénieur en chef du génie maritime.
Plusieurs statuts se dégageaient alors dans ce personnel, au niveau du personnel officier, il y
avait les ingénieurs de l'armement (du génie maritime), les ingénieurs des études et
techniques de l'armement, les officiers des corps techniques et administratifs de l'armement
ou de la marine.
Au niveau des cadres civils, il y avait les ingénieurs civils sur contrat, les ingénieurs
techniciens d'études et de fabrication (chefs de travaux), les secrétaires administratifs et des
agents sur contrat.
Au niveau du personnel ouvrier, il y avait les chefs d'équipe, les techniciens à statut ouvrier,
les instructeurs de formation technique, les ouvriers et employés, les ouvriers d'entreprises
privées ainsi que les élèves de l'EFT.
Le personnel ouvrier était alors encadré par les techniciens d'études et de fabrication et les
secrétaires administratifs.
C'est la particularité à l'arsenal d'avoir différents statuts dans la hiérarchie, avoir des gens
qui sont sous vos ordres, qui gagnent plus, ce n'est pas fait pour arranger les choses.
Plateau des capucins, collecte de mémoires, phase d'expérimentation,
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C'est un peu compliqué notre système. Parce que nos grands chefs c'étaient des ingénieurs de
l'armement qui sont souvent du grand corps de polytechnique, les écoles du génie maritime,
ensuite dans les supérieurs hiérarchiques, les IETA, jusqu'à une certaine année, c'étaient
vraiment les chefs de service et puis arrivé, vers 93, 94, 95, on sentait que ça glissait, qu'il y
avait trop d'échelons hiérarchiques, après, il y avait les chefs d'équipe, y avait les TSO pour
les bureaux d'études, les ouvriers, donc ça faisait trop, surtout que ce n'est pas bon au niveau
responsabilités, ce n'est pas efficace.
Au niveau des ateliers, il y avait donc les ouvriers (huit catégories existaient), les chefs
d'équipe qui constituaient un personnel de maîtrise chargé sous les ordres des officiers et
fonctionnaires civils d'encadrement de diriger le personnel ouvrier, les techniciens à statut
ouvrier qui étaient des agents appartenant à des professions inscrites dans un bordereau de
salaire particulier. Les TSO se répartissaient en cinq grandes familles, les professions du
dessin, les professions de l'électronique, les agents de bureaux de fabrication, les agents de
laboratoires, les calculateurs, pendant un moment il y avait également les traceurs de coques.
Dans tous ces grands ateliers, il y avait donc un bureau de fabrication. Et c'est le bureau de
fabrication qui dépouillait toutes les différentes phases de travail pour savoir à quel poste
allaient être réalisés tous ces différents usinages.
Ce personnel ouvrier était encadré par un chef ou par des chefs d'équipe et au dessus du chef
d'équipe, il y avait donc la partie technique avec les chefs de travaux et au dessus du chef de
travaux il y avait donc l'ingénieur, le chef d'atelier.
Il y a des catégories, et puis des hiérarchies, il y avait les civils et les militaires donc, les
militaires c'étaient les ingénieurs mais il y a la couche en dessous, les IETA, des gens qui se
mélangent maintenant, des civils vous avez les cadres qui étaient des ingénieurs contractuels.
Bon en dessous, les cadres fonctionnaires, c'est ce qu'on appelait chefs de travaux avant, qui
sont les IEF les ingénieur d'études de fabrication, en dessous, y avait d'un côté les
techniciens, ce qu'on appelait les TSO, technicien à statut ouvrier, c'est important parce que
les ouvriers, ils gagnent beaucoup plus, donc les techniciens ouvriers sont recrutés,
maintenant à Bac+2 mais avant ils étaient recrutés en première, formés à l'école d'apprentis
puis envoyés dans des stages très spécialisés pendant un an à Toulon (...) et puis après vous
avez les manus, et dans les manus, il y a les chefs d'équipe.