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Ploudalmezeau le 24 avril 1944

PLOUDALMEZEAU, le 24 AVRIL 1944


TEXTE DE HERVE FARRANT


Prologue


Lundi 24 avril 1944


L'accident


La fuite


La rϩaction allemande


L'arrestation des patriotes


Dauriac en cavale


Epilogue


Remerciements


Sources


PROLOGUE


En fϩvrier 1943, aprϨs l'ϩchec de la RelϨve, l'occupant nazi instaure le Service Obligatoire du Travail , le S.T.O. qui contraint tous les jeunes franϧais des classes 1940, 41 et 42 Ϡ partir de grϩ ou de force travailler en Allemagne.

Refusant l'inacceptable, des jeunes gens rejoignent les rangs de la rϩsistance et les maquis naissants du centre Bretagne.

Nourrir et vϪtir ces volontaires sont pour les organisations clandestines une prioritϩ. Les vols de cartes et tickets de ravitaillement (alimentation, textile, tabac, etc...) dans les mairies se multiplient.

Par deux fois Ï  PloudalmÏ©zeau, des rÏ©sistants brestois du groupe d'actions direct «  DÏ©fense de la France » sous la menace des armes se font remettre les prÏ©cieux tickets entreposÏ©s Ï  la mairie.


Ces deux raids audacieux sont l'oeuvre de Georges Dauriac 21 ans, chef de corps franc, un dur parmi les durs, intrϩpide, courageux, dotϩ d'un capital chance extraordinaire, il est de toutes les actions d'ϩclats de la rϩsistance brestoise.


AprϨs les deux vols de Ploudalmϩzeau, par sϩcuritϩ, les fameux tickets sont entreposϩs tous les soirs Ϡ la gendarmerie distante de 150 mϨtres. Ils sont rϩcupϩrϩs chaque matin pour la distribution journaliϨre par des employϩs du service du ravitaillement. Curieusement , aucune protection gendarmesque n'est prϩvue.


Une nouvelle razzia est tentante.


Dauriac monte une troisiϨme opÏ©ration Ï  partir des informations fournies par la rÏ©sistance locale : le garagiste Boursier, les notaires Lusven et Provostic, les gendarmes Duval et Grannec de la brigade de PloudalmÏ©zeau, Marie Oulhen Ï©tant l'agent de liaison...


Dauriac dϩsigne trois volontaires de son rϩseau et emprunte la traction avant de Jean Le Gall carrossier Ϡ Brest, un ancien du rϩseau de rϩsistance Elie.


LE LUNDI 24 AVRIL 1944


A l'aube naissante d'une journϩe d'avril 1944, une traction avant noire stationne rue Louis Deniel. A son bord , quatre hommes, le chauffeur Yves Hily, 46 ans, l'ancien du groupe, imperturbable et solide comme un roc, Ϡ ses cϴtϩs, Georges Dauriac, le chef du commando. A l'arriϨre, Pierre Herpe, 24 ans, ardent et endurant, le courage mϪme... et un nouveau au rϩseau Georges L........, 23 ans, cheminot Ϡ la SNCF.


Huit heures quinze, mesdemoiselles Louise Pichon 26 ans fille du facteur de Ploudalmϩzeau et Renϩe C... employϩes au service du ravitaillement, dϩtendues et insouciantes quittent la mairie, cheminent en bordure de la place aux vaches et pϩnϨtrent dans la gendarmerie.


Quelques instants plus tard, les deux jeunes filles, la valise aux tickets de ravitaillement Ϡ la main quittent sereines les locaux de la marϩchaussϩe.


La traction dϩmarre et freine brutalement dans un crissement de pneus Ϡ la hauteur des jeunes filles. L'arme au poing, vifs et agiles, Pierre Herpe et Georges L...... bondissent et font main basse sur la valise convoitϩe. Ils embarquent de force Louise Pichon tϩtanisϩe par la surprise Ϡ l'intϩrieur du vϩhicule.

Renϩe C.... affolϩe , hurlante d'effroi s'ϩchappe vers la mairie.


L'ACCIDENT


Un dernier regard dans la lunette arriϨre et la citroën s'Ï©loigne en direction du village de Plouguin.


Dans le virage pernicieux de Ker Eol, entrainϩe par la vitesse, la traction avant aux pneus usϩs fait une embardϩe et percute violemment un poteau ϩlectrique.


Protecteur, le rϩsistant Pierre Herpe protϨge de son corps mademoiselle Pichon.

La tϪte de Georges Dauriac percute le pare brise. Groggy, il a le visage ensanglantϩ et la mϢchoire fracturϩe.

Le chauffeur Yves Hily blessϩ au talon droit ϩvacue son chef de l'habitacle, le prϩcieux butin Ϡ la main.


LA FUITE


AprϨs avoir abandonnϩ Louise Pichon, frissonnante et d'une pϢleur extrϪme, blessϩe aux genoux au bord de la dϩpartementale, Pierre Herpe, nez fracturϩ et menton ouvert et Georges L..

boitillant, s'enfuient Ï  travers champs.

Ils trouvent refuge au presbytϨre de Saint Pabu. Le recteur sympathisant de la rϩsistance, camoufle Pierre Herpe souffrant, dans les combles et confie sa bicyclette Ϡ Georges L.....pour qu'il alerte la rϩsistance brestoise.

Le soir mϪme, Pierre Herpe dans la plus grande discrϩtion est vϩhiculϩ rue Louis Pasteur Ϡ Brest oϹ le docteur de la MarniϨre, rϩsistant de longue date lui prodigue les premiers soins.

Pour Dauriac et Hily blessϩs, la situation est critique, errant dans la campagne, ϩpuisϩs de fatigue, ils sont recueillis par Franϧois Legall de la ferme de Kerscaven en Plouguin.

Alertϩe , la rϩsistance ploudalmϩzienne transporte en camionnette les deux fugitifs Ϡ la ferme de Kϩrϩdern en Trϩglonou chez Job Mouden, agent P2 du rϩseau Jade-Fitzroy.

Dans la soirϩe, le rϩseau Dϩfense de la France prend en charge les deux patriotes.

Dauriac est secrϨtement opϩrϩ Ϡ la clinique du docteur de la MarniϨre.

Apprϩhendant une perquisition et une arrestation imminente, le carrossier brestois Jean Le Gall, propriϩtaire de la traction avant est contraint de se terrer Ϡ Trϩglonou chez Job Mouden.


LA REACTION ALLEMANDE


Deux heures aprϨs l'accident..... informϩe la standorkommandantur de Ploudalmϩzeau estimant que le vol des tickets de ravitaillement est du domaine des autoritϩs franϧaises, intervient tardivement.... Une patrouille germanique dϩcouvre la voiture accidentϩe et ratisse sans rϩsultat le secteur.....

Dans les jours suivants, la kreiskommandantur de Brest offre une rϩcompense contre toutes informations permettant l'arrestation des dangereux malandrins, en vain...

Face Ϡ la montϩe en puissance de la Rϩsistance et l'impunitϩ dont bϩnϩficie les terroristes, l'occupant exaspϩrϩ rϩagit avec vigueur. Le Sicherheits-Dienst, (S.D. Ou service de sϩcuritϩ SS)de Bonne -Nouvelle et le sanguinaire kommando Schaad de Landerneau avec la complicitϩ de policiers vichyssois, passent avec frϩnϩsie et agressivitϩ Ϡ l'offensive.

Le hasard et la malchance servent l'occupant.

Georges L...., un des acteurs de l'attaque du 24 avril 1944 Ϡ Ploudalmϩzeau, impliquϩ dans un stupide vol et dϩnoncϩ par sa logeuse, maitresse d'un ouvrier de l'arsenal, indicateur Ϡ la solde du S.D. de Bonne -Nouvelle.

Georges L.... apprϩhendϩ, sous la contrainte passe aux aveux. Un maillon de la chaϮne clandestine vient de se briser.

Une catastrophe n'arrivant jamais seule, des traitres franϧais acoquinϩs Ϡ la police allemande infiltrent les rϩseaux.

Un gigantesque coup de filet amϨne l'arrestation d'un grand nombre de patriotes. Mai et juin 1944 sont les mois noirs et tragiques de la rϩsistance brestoise et nord finistϩrienne.


LES ARRESTATIONS DES PATRIOTES


Yves Hily le chauffeur de Dauriac est arrϪtÏ© ainsi que les rÏ©sistants Julien Kervella et Gaston Viaron, tous du rÏ©seau « DÏ©fense de la France ». Ils sont fusillÏ©s au fort du Bouguen le 10 juin 1944.

Le colonel Fonferrier du mouvement « DÏ©fense de la France » et commandant militaire de la RÏ©sistance du dÏ©partement du FinistϨre est apprÏ©hendÏ© le 26 mai 1944 Ï  Landunvez. Il dÏ©cϨde Ï  Bergen-Belsen le 27 avril 1945.

Le notaire de Ploudalmϩzeau Provostic, du rϩseau Alliance est arrϪtϩ le 31 mai 1944, suivit de Job Mouden et du carrossier Jean Le Gall. Tous les trois ne survivront pas aux camps nazis.

D'autres arrestations suivent : Joseph Coum de Saint Pabu, Edouard QuÏ©au, et Joseph Scoarnec de Portsall, le notaire Joseph Lusven de PloudalmÏ©zeau, le docteur Lucas de Saint Renan, AimÏ© Talec directeur d'Ï©cole Ï  Ploudaniel, Vincent Toullec et les frϨres L'Azou de Plouescat, Guillaume Penduff inspecteur de police Ï  Landerneau, Jean Riou et ses deux filles Eliane et Simone de Lesneven, Paul Le Pouleuf et son fils Robert, Madame Anna Kervella et sa fille Yvonne, les soeurs Marie-Anne et Marie Piriou.......... liste nominative hÏ©las non exhaustive..... au total des condamnations Ï  mort, des dizaines d'arrestations et de dÏ©portations.


DAURIAC EN CAVALE


AprϨs son opϩration, recherchϩ par les polices allemandes et vichyssoises , Dauriac, le visage dϩfigurϩ se rϩfugie dans diffϩrentes planques. Son ϩtat s'aggrave, une nouvelle intervention chirurgicale est nϩcessaire.

Comprenant l'Ï©tendue du dÏ©sastre, les rues brestoises Ï©troitement surveillÏ©es, les rescapÏ©s du rÏ©seau « DÏ©fense de la France » Ï©laborent un plan rocambolesque.

Dauriac enfermϩ dans un cercueil est transportϩ en fourgon funϩraire Ϡ la clinique du docteur Pouliquen, rue d'Aiguillon. Le convoi mortuaire passe sans encombres les vigilants contrϴles de la feldgendarmerie. L'opϩration mϩdicale est une rϩussite.

Dans les semaines suivantes, avec les survivants du mouvement et de nouveaux volontaires, Dauriac guϩrit, reprend le combat victorieux.


EPILOGUE


AprϨs plusieurs semaines d'un siϨge meurtrier, Brest devenue un amas de dϩcombres calcinϩs est libϩrϩe par les troupes amϩricaines le 18 septembre 1944.

Le 8 mai 1945, le rϩgime hitlϩrien capitule sans conditions.

Pour les rÏ©sistants de l'arrondissement brestois, le bilan humain est lourd : 143 internÏ©s, 237 dÏ©portÏ©s, 38 fusillÏ©s, 83 morts en dÏ©portation, les 35 disparus de la prison de Pontaniou.....et souffrance indicible , 77 veuves de fusillÏ©s et de dÏ©portÏ©s et 134 orphelins.

AprϨs la libϩration, Dauriac est nommϩ chef dϩpartemental du Mouvement de Libϩration National pour le FinistϨre. Militaire de carriϨre, il dϩcϨde Ϡ Brest le 10 juillet 1979. Une rue et un rond point de l'agglomϩration brestoise porte son nom.

Pierre Herpe, un des auteurs de l'attaque de Ploudalmϩzeau survivra Ϡ la tourmente. Patriote sincϨre et dϩsintϩressϩ, il dϩcϨde paisiblement avec le sentiment du devoir accompli.

Louise Pichon et Renϩe C..., remises du traumatisme de l'attaque du 24 avril 1944, fondent dans les annϩes d'aprϨs guerre une famille et rentrent dans l'anonymat des gens heureux.

Georges L..... ne bϩnϩficiant d'aucune indulgence de l'occupant est condamnϩ par un tribunal militaire allemand Ϡ la dϩtention Ϡ perpϩtuitϩ. Transfϩrϩ Ϡ Rennes au camp de Margueritte antichambre de la dϩportation, il y cϴtoie, profil bas, les rϩsistants finistϩriens victimes des rafles des mois de mai et juin 1944. Embarquϩ dans le fameux train du Langeais, le convoi ferroviaire est mitraillϩ par la chasse amϩricaine, dans la confusion gϩnϩrale il s'ϩvade.

Dϩmasquϩ, il est en novembre 1945 condamnϩ pour dϩnonciations de patriotes et intelligence avec l'ennemi par la Cour de justice de Quimper aux travaux forcϩs Ϡ perpϩtuitϩ.


Le 19 mars 1949, malgrÏ© les indignations et les protestations des familles des martyrs et des vÏ©tÏ©rans de l'amicale du Mouvement  « DÏ©fense de la France », Georges L.... est mis en libertÏ© provisoire.......................


REMERCIEMENTS


Mesdames Renϩe Adam, Yvonne Stephan et Paule Tromelin

Monsieur Renϩ Conq de Plouguin

Messieurs Igor de Saint Roch, Claude Squiban , Gildas Saouzanet, Mario Solϩra, Jean Marie Squiban, Bruno Gouez, Clϩment Corolleur, Hugues Vigouroux et Emile Y..........

Les anonymes se reconnaitront..............

Madame Catherine Guevel, responsable du centre multimÏ©dia la « ClÏ© des Champs » de PloudalmÏ©zeau


SOURCES


Archives photographiques Hervϩ Farrant et Gildas Saouzanet.

Archives municipales de Brest

Mϩmoires d'un rϩsistant par Louis Bodiger. Dominique editions 1998

Clandestins de l'Iroise(1940-1944) tome 4 par Renϩ Pichavant . Editions Morgane 1988

Brest rebelle 1939-1945 par Andrϩ Kervella. Editions Skol Vreizh 1998

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