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Art nouveau, Art déco vers le Modernisme... : Différence entre versions

(L'art nouveau)
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par Gilbert Elleouet - membre du comité scientifique "Brest, ville d'Art et d'Histoire".
 
par Gilbert Elleouet - membre du comité scientifique "Brest, ville d'Art et d'Histoire".
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L’art nouveau va naître de la convergence  de savoirs faire. Les métiers de l’architecture, de la  céramique, du  verre, de l’ébénisterie, de mosaïque vont réunir les noms de Guimard, de [https://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_Sauvage Sauvage], de [https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_Majorelle Majorelle], [https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89cole_de_Nancy_(art) L’école de Nancy], de [https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89mile_Gall%C3%A9 Gallé], de [https://fr.wikipedia.org/wiki/Antonin_Daum Daum]….  
 
L’art nouveau va naître de la convergence  de savoirs faire. Les métiers de l’architecture, de la  céramique, du  verre, de l’ébénisterie, de mosaïque vont réunir les noms de Guimard, de [https://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_Sauvage Sauvage], de [https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_Majorelle Majorelle], [https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89cole_de_Nancy_(art) L’école de Nancy], de [https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89mile_Gall%C3%A9 Gallé], de [https://fr.wikipedia.org/wiki/Antonin_Daum Daum]….  
  
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L’idée est de s’écarter des principes de l’unité en assemblant des matériaux très divers dans une esthétique de la complexité. Pierres de taille, meulières en  briques de tonalité  variée, émaillée ou non, profilés  de fer rigide, arabesques de fer forgé, éléments de fonte, tôle découpée.
 
L’idée est de s’écarter des principes de l’unité en assemblant des matériaux très divers dans une esthétique de la complexité. Pierres de taille, meulières en  briques de tonalité  variée, émaillée ou non, profilés  de fer rigide, arabesques de fer forgé, éléments de fonte, tôle découpée.
  
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La maison "''art nouveau"'' offre une haute valeur d’usage par  une distribution et un confort très étudiés ainsi qu’une esthétique fidèle  aux  approches rationalistes de l’architecture médiévale et du naturalisme.
 
La maison "''art nouveau"'' offre une haute valeur d’usage par  une distribution et un confort très étudiés ainsi qu’une esthétique fidèle  aux  approches rationalistes de l’architecture médiévale et du naturalisme.
[[Fichier:Maison Crosnier à Brest.jpg|vignette|200x200px|Maison Crosnier - 20 rue de Denver (architecte Sylvain Crosnier)]]
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<blockquote>Maison Majorelle: Associant la pierre de taille pour des paliers portants à la brique pour les remplissages, 4 travées donc sans travée centrale distingue la travée de l’escalier des autres mettant en évidence le bow-window et un décor sculpté dans la pierre à motifs floraux. Les baies vitrées présentent des rosaces d’inspiration gothique ou des formes arquées évoquant les branches d’un arbre. Elle prend en compte les derniers éléments de confort en particulier le fait d’associer toilettes et salle d’eau à la chambre.</blockquote>
<blockquote>Maison Majorelle: Associant la pierre de taille pour des paliers portants à la brique pour les remplissages, 4 travées donc sans travée centrale distingue la travée de l’escalier des autres mettant en évidence le bow-window et un décor sculpté dans la pierre à motifs floraux. Les baies vitrées présentent des rosaces d’inspiration gothique ou des formes arquées évoquant les branches d’un arbre. Elle prend en compte les derniers éléments de confort en particulier le fait d’associer toilettes et salle d’eau à la chambre.</blockquote>La maison Crosnier au 20 rue de Denver de style art Nouveau a été réalisée en 1900 par le maître d’œuvre Sylvain Crosnier. Elle est typiquement polylithique, avec association du granite de Huelgoat, kersantite, pierre de Logonna et briques de terre cuite. C'est l'un des bâtiments les plus intéressants de la Belle Epoque à Brest.
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La maison Crosnier au 20 rue de Denver de style art Nouveau a été réalisée en 1900 par le maître d’œuvre Sylvain Crosnier. Elle est typiquement polylithique, avec association du granite de Huelgoat, kersantite, pierre de Logonna et briques de terre cuite. C'est l'un des bâtiments les plus intéressants de la Belle Epoque à Brest.
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Fichier:Maison Crosnier à Brest.jpg|Maison Crosnier - 20 rue de Denver (architecte Sylvain Crosnier)
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Fichier:40 rue Gambetta (Brest).jpg|Façade côté Cours Dajot
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[https://fr.wikipedia.org/wiki/Isidore_Odorico Odorico] venu d’Italie et d’autres mosaïstes agrémentent les intérieurs.
 
[https://fr.wikipedia.org/wiki/Isidore_Odorico Odorico] venu d’Italie et d’autres mosaïstes agrémentent les intérieurs.
 
<center><gallery caption="Carreaux de faïences d'après Odorico" widths="200" heights="200">
 
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Il est de l’architecture comme de l’art. Les courants se succèdent, s’opposent, se superposent dans le temps. [https://fr.wikipedia.org/wiki/Maurice_Denis Maurice Denis] poursuit à sa manière l’aventure des [https://fr.wikipedia.org/wiki/Nabi_(peinture) Nabis] alors qu’est né le [https://fr.wikipedia.org/wiki/Fauvisme Fauvisme]. [https://fr.wikipedia.org/wiki/Maurice_de_Vlaminck Maurice de Vlaminck] et [https://fr.wikipedia.org/wiki/Raoul_Dufy Raoul Dufy] continueront de diffuser ce mouvement pictural alors que depuis 1907, [https://fr.wikipedia.org/wiki/Pablo_Picasso Picasso] et [https://fr.wikipedia.org/wiki/Georges_Braque Braque] ont donné naissance au [https://fr.wikipedia.org/wiki/Cubisme cubisme].  
 
Il est de l’architecture comme de l’art. Les courants se succèdent, s’opposent, se superposent dans le temps. [https://fr.wikipedia.org/wiki/Maurice_Denis Maurice Denis] poursuit à sa manière l’aventure des [https://fr.wikipedia.org/wiki/Nabi_(peinture) Nabis] alors qu’est né le [https://fr.wikipedia.org/wiki/Fauvisme Fauvisme]. [https://fr.wikipedia.org/wiki/Maurice_de_Vlaminck Maurice de Vlaminck] et [https://fr.wikipedia.org/wiki/Raoul_Dufy Raoul Dufy] continueront de diffuser ce mouvement pictural alors que depuis 1907, [https://fr.wikipedia.org/wiki/Pablo_Picasso Picasso] et [https://fr.wikipedia.org/wiki/Georges_Braque Braque] ont donné naissance au [https://fr.wikipedia.org/wiki/Cubisme cubisme].  
  
En architecture, l’art déco va exister en opposition à l’art nouveau qualifié par ses détracteurs "d'art nouille ». En juste retour des choses, le design s’empare à nouveau aujourd’hui de ce courant artistique comme d’ailleurs de l’art déco.  
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En architecture, l’art déco va exister en opposition à l’art nouveau qualifié par ses détracteurs "d'art nouille ». En juste retour des choses, le design s’empare à nouveau aujourd’hui de ce courant artistique comme d’ailleurs de l’art déco.
  
 
== Naissance de l’Art Déco ==
 
== Naissance de l’Art Déco ==
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== Remerciements ==
 
== Remerciements ==
 
A Daniel Le Couédic pour ce qu’il m’apporte à chacune de nos rencontres ; à Christelle Jorand, architecte conseil à BM pour sa bienveillance et sa compétence ; à Hélène Magueur, chef de projet au conseil architectural et urbain, à Jean – Christophe Bernard, architecte conseil à BM, à Maël Kerguillec, technicien à l’agence des bâtiments de France pour nos déambulations partagées, à Yves Pailler pour le plaisir de nos conversations sur l’architecture. 
 
A Daniel Le Couédic pour ce qu’il m’apporte à chacune de nos rencontres ; à Christelle Jorand, architecte conseil à BM pour sa bienveillance et sa compétence ; à Hélène Magueur, chef de projet au conseil architectural et urbain, à Jean – Christophe Bernard, architecte conseil à BM, à Maël Kerguillec, technicien à l’agence des bâtiments de France pour nos déambulations partagées, à Yves Pailler pour le plaisir de nos conversations sur l’architecture. 
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Version actuelle datée du 18 décembre 2019 à 12:12

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par Gilbert Elleouet - membre du comité scientifique "Brest, ville d'Art et d'Histoire".

face à face, l’art nouveau et l’art déco à St-Martin

« Art nouveau »….. Entre continuité et rupture….. vers l’ « Art déco » …. et le modernisme

La révolution industrielle du dix-neuvième siècle avait dans sa brutalité, profondément et durablement changé le quotidien des êtres humains.

En opposition à une certaine banalité des formes artistiques et architecturales, l’art nouveau, imprégné de formes observées dans la nature, définit de 1890 à 1914 une nouvelle esthétique du mouvement.

La pierre, la brique, la céramique utilisée au dessus des fenêtres et des portes, le fer et la fonte pour les balcons permettent de s’affranchir du classicisme et d’éviter la monotonie des façades.

Les arts décoratifs et la révolution industrielle avaient montré le chemin de l’association de matériaux divers : le béton armé, la fonte, l’acier, le verre mais aussi des matériaux plus anciennement utilisés : la brique rouge, le bois.

L'art nouveau

Avec l’art nouveau s’affirme l’idée générale d’écarter toute référence au classicisme.

Pont Alexandre III (Paris), 1897-1900

Deux courants architecturaux vont progressivement naître de l’utilisation des nouveaux matériaux :

  • Le premier met l’accent sur les percements, la couverture en terrasse. L’apparence du béton est alors dissimulée par un parement de brique parfois agrémenté de céramique polychrome.
La Gare de Tours est un exemple de l’alliance entre l’acier et la pierre.

L’acier permet aussi maintenant de résoudre la quasi totalité des défis techniques et esthétiques : Paris, Pont Alexandre III 1897-1900.

  • Le deuxième cherche alors à mettre en valeur l’ossature béton pour elle-même. François Hennebique vient en 1892, d’en inventer le procédé.

L’apparition de l’ascenseur bouleverse la valeur immobilière : à l’agrément du bel étage se substitue celui des étages supérieurs avec leur terrasse et vue panoramique.

Les industriels des matériaux céramiques, en mettant des produits nouveaux résistant au gel, vont permettre de moduler la décoration extérieure des bâtiments. Surtout connu pour sa mission de restauration du patrimoine médiéval mais aussi pour le courant « gothique naturaliste » qu'il crée, Violet Le Duc va par ses entretiens sur l’architecture publiés entre 1863 et 1872 annoncer la voie de la modernité et la naissance de l’art nouveau (Guimard, Horta, Gaudi…)

« Il faut être vrai selon le programme, vrai selon les procédés de construction. »

« La nature est le plus grand bâtisseur et elle ne fait rien de parallèle et rien de symétrique. »

L’art nouveau va naître de la convergence de savoirs faire. Les métiers de l’architecture, de la céramique, du verre, de l’ébénisterie, de mosaïque vont réunir les noms de Guimard, de Sauvage, de Majorelle, L’école de Nancy, de Gallé, de Daum….

55 rue Jean sans Peur (Lille) - Eléments néogothique et naturalistes

L’idée est de s’écarter des principes de l’unité en assemblant des matériaux très divers dans une esthétique de la complexité. Pierres de taille, meulières en briques de tonalité variée, émaillée ou non, profilés de fer rigide, arabesques de fer forgé, éléments de fonte, tôle découpée.

La maison "art nouveau" offre une haute valeur d’usage par une distribution et un confort très étudiés ainsi qu’une esthétique fidèle aux approches rationalistes de l’architecture médiévale et du naturalisme.

Maison Majorelle: Associant la pierre de taille pour des paliers portants à la brique pour les remplissages, 4 travées donc sans travée centrale distingue la travée de l’escalier des autres mettant en évidence le bow-window et un décor sculpté dans la pierre à motifs floraux. Les baies vitrées présentent des rosaces d’inspiration gothique ou des formes arquées évoquant les branches d’un arbre. Elle prend en compte les derniers éléments de confort en particulier le fait d’associer toilettes et salle d’eau à la chambre.

La maison Crosnier au 20 rue de Denver de style art Nouveau a été réalisée en 1900 par le maître d’œuvre Sylvain Crosnier. Elle est typiquement polylithique, avec association du granite de Huelgoat, kersantite, pierre de Logonna et briques de terre cuite. C'est l'un des bâtiments les plus intéressants de la Belle Epoque à Brest.

Odorico venu d’Italie et d’autres mosaïstes agrémentent les intérieurs.

Les réalisations vont être longtemps méprisées, jusqu’à une grande exposition en 1964 sur Les sources du XXème siècle. En 1947, la veuve d’Hector Guimard avait pourtant offert l’hôtel particulier et son mobilier qui avait été dispersé. En 1970, le Museum of Modern Art de New York (MoMA) expose Guimard. Il est redécouvert par les peintres du XXème siècle et surtout par Dali.

Art nouveau et classicisme au 40 Bd Gambetta

La rupture occasionnée de fait par la première guerre mondiale ainsi que l’Exposition internationale des arts décoratifs et industriels modernes à Paris en 1925 vont mettre en lumière un nouveau style : l’Art Déco.

Il est de l’architecture comme de l’art. Les courants se succèdent, s’opposent, se superposent dans le temps. Maurice Denis poursuit à sa manière l’aventure des Nabis alors qu’est né le Fauvisme. Maurice de Vlaminck et Raoul Dufy continueront de diffuser ce mouvement pictural alors que depuis 1907, Picasso et Braque ont donné naissance au cubisme.

En architecture, l’art déco va exister en opposition à l’art nouveau qualifié par ses détracteurs "d'art nouille ». En juste retour des choses, le design s’empare à nouveau aujourd’hui de ce courant artistique comme d’ailleurs de l’art déco.

Naissance de l’Art Déco

Dès 1907, Eugène Grasset avait publié une « Méthode de composition ornementale » qui donnait la part belle aux formes géométriques et à ses déclinaisons. Ce traité était en cela pleinement contemporain des formes linéaires et fragmentées du cubisme. L’orphisme, cher à Robert et Sonia Delaunay expérimente d’autres utilisations des formes géométriques, constituant également une étape vers l’abstraction.

La rupture occasionnée de fait par la première guerre mondiale ainsi que l’Exposition Internationale des arts décoratifs et industriels modernes à Paris en 1925 vont mettre en lumière un nouveau style : l’Art Déco.

Tandis que l’Art Nouveau se caractérisait par des formes végétales, courbes et ondulantes (Viollet-le-Duc et le courant naturaliste en avait été les inspirateurs), l’architecture Art Déco est plutôt rectiligne. Droites, zigzags, chevrons, arcs concentriques sont fréquents. Ces derniers sont ainsi utilisés autant au niveau de la scène que de la salle du Carnegie Hall à New York. La flèche du gratte-ciel Chrysler de Van Halen en est un autre exemple. L’exotisme (Egyptien, Asiatique, Maya...) influence aussi cet art.

L’art est également exploité par les peintres. D’origine polonaise, Tamara de Lempicka, élève de Maurice Denis et de Lhote, est en France la plus emblématique représentante. L’Art déco se décline en meubles, verrières, portes, luminaires, sculptures…

Les Immeubles « Art déco » à Brest

Brest n’est ni Paris, ni Bruxelles, ni Vienne mais il subsiste à Brest de nombreuses traces de cette architecture.

Contrairement à une idée encore reçue, la seconde guerre mondiale n’a pas complètement détruit la ville. Il nous reste à continuer de le démontrer dans le cadre de la récente labellisation de Brest, ville d’art et d’histoire.

Carte des destructions après la seconde guerre mondiale (en rose)

De fait, comme le montre la carte ci-dessous extraite de Brest Alias Brest, les destructions ont surtout touchées l’hypercentre. En septembre 1944, dans ce dernier, seulement sept immeubles entiers étaient demeurés « debout ».

En dehors de ce centre- ville, que ce soit rive droite ou rive gauche de la Penfeld, les bombardements avaient beaucoup détruit mais l’analyse de la carte montre aussi que différents quartiers n’avaient pas été autant ravagés.

À propos d’immeubles ou de maisons « Art déco », sans doute faut–il différencier la rive droite et la rive gauche ? Comme pour l’Art nouveau, les caractéristiques du style « Art déco » vont être plus lisibles dans les quartiers plus bourgeois de la rive gauche, même si les maisons de style « Art déco » sont bien représentées dans les quartiers des Quatre Moulins et de Kerbonne.

Plusieurs architectes vont s’y employer : Aimé Freyssinet, frère d’Eugène Freyssinet, inventeur du béton précontraint et bâtisseur du pont Albert Louppe; Gaston et Abel Chabal ; Joseph et Maurice Philippe, son neveu; Jean Lacaille ; Le Coz et Raymond Célestine, Georges Milineau. Ce dernier, avait eu pour mission d’écrire le plan d’aménagement, d’extension et d’embellissement de la ville. Daniel Le Couedic précise: « Il fut engagé comme architecte principal le 24 septembre 1919. Ce parisien qui avait été l’élève de Victor Laloux à l’Ecole nationale des Beaux Arts se mit immédiatement au travail et produisit une première esquisse dès septembre 1920. Il dut toutefois rapidement reconsidérer ses options, puisque 1921 fut l’année si longtemps attendue où l’on déclassa enfin les fortifications. La réunification de la ville pouvait alors paraître prochaine. ». Il séjourna au 42 rue Branda dans un immeuble « Art déco » dont il avait été l’architecte et qui était sa propriété. L’entrepreneur Prosper Richet fut également un acteur important.

Sur la rive droite, quelques édifices sont néanmoins visibles. L’ancien cinéma Armor dans une rue Armorique aux maisons néoclassiques du début du 20ème siècle, présente sa façade dessinée par Aimé Freyssinet à oculi et bandeau filant. Construit en 1939, un autre immeuble à modénature soulignant l’angle se dresse au 210 rue Anatole-France. Parfois, curieusement, l’étage « art déco » a été bâti sur un socle néoclassique du début du 20ème siècle, comme au 39 rue du Rempart.

Rive gauche, les immeubles et maisons sont en nombre même si l’Art déco est plus une architecture d’immeuble que de maison. Rue de Glasgow ou Boulevard Gambetta, des îlots entiers ont visibles. Le bow-window déjà présent dans les immeubles Art nouveau va être nouvellement décliné. Il sert tantôt la symétrie, tantôt la dissymétrie de la composition. La dissymétrie peut alors s’opérer jusqu’au dernier niveau où un balcon filant, en retrait attire l’attention sur le couronnement de cet étage.

L’ascenseur dessert un appartement par étage. Dans les étages inférieurs, le bow-window est souligné par un garde-corps plein.

En d’autres endroits, le bow-window sert la symétrie ou dessine le pan coupé de l’angle de l’immeuble ou de l’îlot.

Parfois encore, le bow-window est décliné deux fois pour affirmer la symétrie. Ci-après, une coupure de presse extraite de la Dépêche de Brest, 1938, nous présente l’architecture du bâtiment et tout le confort de l’appartement (chauffage central individuel, ascenseur, tout à l’égout, planchers insonores…). Ces immeubles contrairement à beaucoup de bâtiments de la reconstruction sont souvent équipés d’un ascenseur. Les deux immeubles en bénéficient également.

4 rue de Turenne (architectes Le Coz et Raymond Célestine)

Ailleurs, la façade s’organise autour d’une colonne de pavés de verre.

9 rue Victor-Hugo

Parfois, enfin, le bow-window prend une forme arrondie comme au 4 rue de Turenne.

Dans les maisons individuelles, les linteaux à la mouluration curviligne ou diversifiée déclinent le style.

Au 9 rue Victor Hugo, on peut noter l’intégration d’une maison « Art déco » dans un immeuble achevé en 2017. La reprise des couleurs des moulures curvilignes met en valeur les appuis des baies et des linteaux.

Les balcons filants, les arcs de fenêtre, les chevrons vont permettre de souligner l’épure des façades. L’utilisation de gradins correspondant aux étages permet de traduire à la manière des « sky-scrapers » une ligne de ciel, visible ci-dessous. A l'intérieur des immeubles, les appartements sont desservis par des coursives intérieures organisées autour d'un puits de lumière.

Parfois, des colonnades et autres balustres inspirées des « îles » caribéennes viennent souligner la composition. De plus, les colonnes en aplats à chapiteau, ici revisitées « Art déco » viennent souligner les encadrements. Nous retrouvons cette conception dans le mur de clôture en façade. 

24 Bd Gambetta (architecte Aimé Freyssinet)

Les constructions navales en plein essor inspirent également les architectes qui donnent aux immeubles « Art déco » une forme "paquebot" dont l’angle a souvent la forme de la proue d’un navire. À la manière d’un bateau, les œils-de-bœuf sont en forme de hublots, les gardes corps en forme de bastingages soulignent le dernier étage et le toit terrasse. Art déco tardif, immeuble Aimé Freyssinet, dit de « style paquebot » que l’on peut qualifier de « Flatiron » brestois, dans la mesure où à la manière de l’immeuble New Yorkais, il est lui aussi construit sur un triangle. Les deux derniers étages sont achevés après la deuxième guerre mondiale. Notons qu’il en existe un quasi similaire, inspiré du « Bauhaus » à Tel Aviv. Quand l’élégance n’a pas de frontières….  

Voir en plein écran

Le modernisme, un autre et nouveau courant architectural.

Le Modernisme naissant après la première guerre mondiale va véritablement s’affirmer avec Le Corbusier, De Stijl De Stijl et le Bauhaus. Le dénominateur commun de leurs idées est : « Adapter la forme à la fonction. »

À Brest, Urbain Cassan, élève de Le Corbusier est l’architecte de la nouvelle gare achevée en 1936. Il érige d’abord un campanile au sommet duquel est placée une horloge. Y est adossé un édifice de forme quasi cylindrique, le tout constituant la silhouette d’une locomotive. Le hall dans sa forme est ainsi synonyme de gare terminus. La modénature emprunte à l’art déco mais il suffit d’observer de nuit, le hall éclairé pour comprendre que le modernisme, cette nouvelle architecture ici sans travée horizontale démode les travaux antérieurs.

Adeptes du même courant architectural, les architectes Gravereaux et Lopez construisent le nouvel hôpital Morvan à l’accueil de forme concave. Partiellement détruit pendant le deuxième guerre mondiale, il n’est ouvert au public qu’après celle-ci.

L’inspiration Art déco dans un immeuble de la reconstruction au1 rue de Siam
L’inspiration « Art Déco » s’invite aussi dans les immeubles néoclassiques de la reconstruction. Le Brest de la reconstruction va permettre l’expression de différents courants architecturaux : le Modernisme, le néoclacissisme…. et d’autres influencés par le passé et l’ailleurs…

Quant aux designers d’aujourd’hui, ils ont fort bien compris le parti qu’ils pouvaient retirer de ces formes nées un siècle plus tôt.

L’art, un éternel recommencement….

Référence

  • Patrick Dieudonné, Daniel Le Couédic, Emmanuelle Champot, Yves Le Gallo, Philippe Henwood, et al. Brest alias Brest : Trois siècles d'urbanisme. Mardaga, pp.239, 1992. 

Remerciements

A Daniel Le Couédic pour ce qu’il m’apporte à chacune de nos rencontres ; à Christelle Jorand, architecte conseil à BM pour sa bienveillance et sa compétence ; à Hélène Magueur, chef de projet au conseil architectural et urbain, à Jean – Christophe Bernard, architecte conseil à BM, à Maël Kerguillec, technicien à l’agence des bâtiments de France pour nos déambulations partagées, à Yves Pailler pour le plaisir de nos conversations sur l’architecture. 

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