Rue Eugène Delacroix

DELACROIX 1798-1863

Ce texte de Mona Lisa Cornec est paru dans TAPAJ n° 40 d'octobre 1994

Peintre français, lithographe, écrivain, fils présumé de Talleyrand, Eugène Delacroix est né en 1798 à Saint-Maurice (Val-de-Marne) et mort à Paris en 1863.

Il dessine à 7 ans mais son enfance n'est pas très heureuse. A15 ans, il perd sa mère, fille du célèbre ébéniste Oeben et vit auprès d'une soeur qui ne lui manifeste aucun attachement. En 1816, il devient l'élève de Guérin dont il supporte mal les leçons de classicisme. Il se lie avec le peintre Géricault. Raymond Soulier lui apprend l'aquarelle.

En 1822, il expose au Salon La Barque de Dante : enthousiasme des uns, forte réprobation des autres et en 1824 Scènes de massacres de Scio.

Déjà, Delacroix apparaît comme le peintre du mouvement et il fait vibrer la couleur comme personne avant lui ne l'avait fait. A part les lectures exaltantes pour lui de Goethe et de Shakespeare, le travail l'absorbe tout entier. Il peint entre autres Le Tassé dans la prison des fous ; La Mort de Charles Le Téméraire ; La Barque de Don Juan ; Milton aveugle (1827) ; La Mort de Sardanapale qu'il envoie au salon. En 1828, il dessine des costumes de théâtre pour Victor Hugo.

En 1831, il donne Liberté guidant le Monde avec tellement d'authenticité et de lyrisme brutal qu'on hésitera à l'exposer de façon trop permanente.

En hiver 1832, Delacroix débarque à Tanger. A 34 ans il découvre l'Orient (parti pour trois semaines, il y restera six mois). Un choc, une révélation. Odeurs, senteurs, fleurs, sultans et fêtes envahissent ses carnets.

En France, les esquisses deviendront tableaux. Et l'aventure du Maroc imprégnera le reste de son œuvre. Citons parmi ces toiles aux teintes somptueuses : Bords de VOued Sebou ; La Fantasia arabe ; Femmes d'Alger (1834 ) ; Noce juive au Maroc (1839) ; Le Sultan du Maroc entouré de sa garde (1845 ) ; Chasse aux lions (1854).

L'année 1833 ouvre une période de grands travaux qui l'occuperont pendant 20 ans. Parmi ceux-ci, les peintures murales de la Chambre des Députés (1833 et 1842), de la bibliothèque du Sénat (1847), du Louvre (le fameux plafond d'Apollon en 1851), de l'Hôtel de Ville de Paris, du Château de Versailles.

Delacroix participe activement à la vie de son temps et compte parmi ses amis les plus sûrs et les plus fidèles des artistes, écrivains ou musiciens comme George Sand et Frédéric Chopin. Mais il n'est pas unanimement adopté (refusé à l'Institut en 1837, il s'y présentera en vain sept fois pour enfin pouvoir y siéger en 1857).

En 1838, il visite la Belgique et la Hollande et en 1841, peint l'Entrée des croisés à Constantinople. Il est toujours très discuté mais sa renommée s'accroît. En 1855, à l'Exposition univer-Autoportrait selle, son triomphe est complet. Mais il est atteint de laryngite tuberculeuse. Il luttera pendant 5 ans et exécutera dans un épuisement grandissant Le Combat de Jacob et de l'Ange pour la chapelle des Saints-Anges à Saint-Sulpice.

Son œuvre comprend aussi d'admirables portraits : George Sand, Chopin, Paganini, Jenny Le Guillou (la fidèle servante originaire du Finistère). Delacroix a d'autres cordes à son arc : en 1828, paraît à Paris chez Charles Motte éditeur et Sautelet libraire Le Faust de Goethe. Comportant dix-sept lithographies magnifiquement gravées par Delacroix lui-même, cet ouvrage, un des plus célèbres de tous les temps ouvrait une ère nouvelle pour l'édition de luxe illustrée.

Delacroix a aussi rédigé un Journal en trois volumes ainsi qu'une importante Correspondance dont la lecture très agréable montre de véritables dons d'écrivain.

Eugène Delacroix et son frère auraient servi de modèle pour les personnages des frères Brideau de la Comédie Humaine de Balzac. Un roman Un ménage de garçon (plus communément appelé la Rabouilleuse) leur est consacré.

Mona-Lisa Cornec