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Madame G., coiffeuse, et Monsieur G., agent administratif EDF : Différence entre versions

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Mme G. : Mon métier était prenant, très prenant, moi j'ai beaucoup aimé mon métier, j'allais à paris pour L'Oréal, L'Oréal c'est la maison importe pour les coiffeurs, là j'avais des modèles, des grands coiffeurs qui se déplaçaient, qui venaient voir comment vous travailliez.
  
Mme G. : On m'a proposé une place à paris, mirobolante au point de vue argent, mais je n'ai jamais voulu, je n'ai jamais voulu quitter [[Brest]], et je crois que j'ai bien fait. J'ai rencontré quantité de gens, beaucoup d'artistes, parce qu'au cinéma Le Celtic, ils recevaient les artistes qui venaient chanter pour une soirée et automatiquement elles venaient se faire coiffer (Dalida). J'ai eu le plaisir de parler, enfin de poser des questions, elle répondait ou elle ne répondait pas, je ne voulais pas avoir l'air d'une imbécile dans mon coin de Bretagne, parce qu'au fond quand vous dites la Bretagne on vous considère comme une imbécile. C'est terrible mais c'est vrai.
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Mme G. : On m'a proposé une place à paris, mirobolante au point de vue argent, mais je n'ai jamais voulu, je n'ai jamais voulu quitter [[is_city::Brest]], et je crois que j'ai bien fait. J'ai rencontré quantité de gens, beaucoup d'artistes, parce qu'au cinéma Le Celtic, ils recevaient les artistes qui venaient chanter pour une soirée et automatiquement elles venaient se faire coiffer (Dalida). J'ai eu le plaisir de parler, enfin de poser des questions, elle répondait ou elle ne répondait pas, je ne voulais pas avoir l'air d'une imbécile dans mon coin de Bretagne, parce qu'au fond quand vous dites la Bretagne on vous considère comme une imbécile. C'est terrible mais c'est vrai.
  
  
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Version actuelle datée du 24 juillet 2014 à 13:20

Rencontre avec Madame G., coiffeuse, et Monsieur G., agent administratif EDF à la maison de retraite Le Lys Blanc. Entretien réalisé par Léna Madec et Matthieu Colin.


Mme, quel métier que vous avez exercé ?

Mme G. : Moi, j'étais coiffeuse, j'ai commencé comme apprenti, à 14 ans, 3 ans après, j'étais formée, j'étais ouvrière et donc je travaillais et je commençais à gagner ma vie. C'était très dur comme métier, surtout que nous avions beaucoup, beaucoup de travail, je ne mangeais jamais le midi, je n'avais pas le temps. J'ai aimé mon métier. Et j'ai eu l'occasion de coiffer même à Paris, à la maison L'Oréal, et on m'a demandé plusieurs fois d'aller travailler à Paris, je n'ai jamais voulu quitter ma Bretagne et quitter les clientes que j'avais ici, parce qu'on arrive bien à se connaître et il y a une amitié qui se forme entre nous et les clientes.


C'est vrai qu'il y a un lien, c'est l'occasion de parler avec les gens quand ils se font coiffer, ils vous parlent un peu de leur vie ?

Mme G. : Oui et quand elles ont du chagrin, elles vont venir vous raconter leur vie, il faut savoir écouter et leur répondre de façon à les mettre sur la bonne voie, ça m'est arrivé plusieurs fois.


Et à quelle époque avez-vous commencé ?

Mme G. : En 1937, j'étais coiffeuse, j'avais mon métier en main, je n'étais plus apprentie. On commençait le matin à 8h, j'ai rarement mangé à midi, je n'avais pas le temps, j'avais une grosse clientèle, une clientèle très agréable, polie, bien élevée, qui avait une très bonne situation. L'Amiral par exemple vous voyez, je vous cite l'Amiral parce que c'est un nom qui frappe, je veux dire par là que c'étaient des gens bien élevés.


Pour en revenir à votre métier...

Mme G. : Mon métier était prenant, très prenant, moi j'ai beaucoup aimé mon métier, j'allais à paris pour L'Oréal, L'Oréal c'est la maison importe pour les coiffeurs, là j'avais des modèles, des grands coiffeurs qui se déplaçaient, qui venaient voir comment vous travailliez.

Mme G. : On m'a proposé une place à paris, mirobolante au point de vue argent, mais je n'ai jamais voulu, je n'ai jamais voulu quitter Brest, et je crois que j'ai bien fait. J'ai rencontré quantité de gens, beaucoup d'artistes, parce qu'au cinéma Le Celtic, ils recevaient les artistes qui venaient chanter pour une soirée et automatiquement elles venaient se faire coiffer (Dalida). J'ai eu le plaisir de parler, enfin de poser des questions, elle répondait ou elle ne répondait pas, je ne voulais pas avoir l'air d'une imbécile dans mon coin de Bretagne, parce qu'au fond quand vous dites la Bretagne on vous considère comme une imbécile. C'est terrible mais c'est vrai.


C'est considéré comme reculé, la province ?

M. G. : « Vous venez de si loin, mais ce n'est pas possible. Mais ceux sont des ploucs ».

Mme G. : toujours les bretons ont été considérés comme des idiots, c'est vrai hein !


Et donc vous étiez coiffeuse à Brest, ici ?

Mme G. : Oui.


Dans quel coin de Brest ?

Mme G. : Rue Jean Jaurès, donc forcement on avait une clientèle aussi... C'est toujours agréable car on a affaire à des gens bien élevés, moi je ne supporte pas qu'on soit mal élevé. J'ai eu la chance de travailler dans un milieu très correct, très gentil. Je n'avais pas de cliente de passage.


Et du coup vous étiez coiffeuse pendant la guerre ? Ca a changé quelque chose dans la pratique de votre métier ?

Mme G. : Oui, il fallait coiffer les allemandes, les femmes d'officier, C'était le soir que c'était pénible surtout, c'était le soir que ça commençait à canarder, dans la journée encore ca allait, mais le soir qu'est ce qu'on prenait.


Et les gens venaient toujours autant se faire coiffer même si c'était la guerre, où est ce qu'il y avait moins de monde ?

Mme G. : Ohhhhhhhhhh, il y avait du monde, beaucoup de monde, je n'avais pas le temps de manger le midi, pour satisfaire les clientes.

M G : Elles avaient besoin de parler, d'échanger, de réconfort.

Mme G. : Il faut savoir que dans la coiffure vous avez à faire à vos clientes pendant longtemps, elles vont vous raconter une partie de leur vie, alors il faut savoir quand elles ont moral épouvantable, et essayer de les remonter.


Et vos journées se terminaient tard, vous commenciez à 8h ?

Mme G. : Je finissais à 8h le soir, 12h par jour, mais on trouvait ça normal et j'adorais mon métier.


C'était un métier bien considéré, bien vu d'être coiffeuse ?

Mme G. : Non, non non, pas au départ, mais quand j'ai réussi à me faire connaître, là j'étais vraiment respectée.

M G. : Tout à l'heure elle vous a parlé de sa vie ouvrière, mais elle a été patronne d'un salon.

Mme G : Toute ma clientèle m'a suivie.

M G. : On a acheté un fond de commerce rue Voltaire à Brest.


Vous trouvez que le métier a changé aujourd'hui par rapport à votre époque ?

Mme G. : Je pense que non, je suis allée me faire coiffer là, je crois qu'elles travaillent moins (moins d'heures) qu'on ne travaillait.

M G : Tu m'as dit que les jeunes c'était « brushing, brushing, brushing ».


Et vous avez formé des apprenties ?

Mme G. : Oui, oui j'aimais bien transmettre, mais on se rend compte très vite si vous êtes doué ou pas, si elle est douée, moi je la gardais comme apprentie, mais si elle ne veut pas, ben ce n'est pas la peine de perdre son temps à elle et moi. Mais j'en ai formée plusieurs. J'aimais bien mon métier, j'adorais mon métier.

M G : Elle a pris sa retraite en même temps que moi, en 77.


Qu'avez-vous fait du salon ?

M. G. : On l'a revendu, et on n'a pas eu de problème au niveau situation.


Et du coup, vous M., vous avez exercé quel métier ?

M. G. : D'abord j'ai fait des études au lycée de Brest, et comme j'étais un peu fainéant sur les bords, je suis allé jusqu'au bac et je me suis fait proprement recalé, et mon père qui était instituteur, il m'a dit « viens par ici, je vais te lancer un ultimatum, ou tu repasses ton bac ou tu t'engages dans la marine », et du coup comme j'en avais marre, je me suis engagé.

Mme G : Et moi je l'ai connu avec ses galons de quartier maître.


Et vous êtes donc rentré dans la marine à quel âge ?

M. G. : En 1937, pas tout de suite comme quartier maître. Et j'ai fait toute la guerre bien sûr.


Du coup vous avez pas mal voyagé ?

M. G. : Oui, j'ai beaucoup voyagé, on a transporté l'or de la banque de France au canada, des lingots. On a pris un convoi qui allait en Angleterre, on a mis 15 jours à aller à Halifax, qui se trouve en nouvelle Ecosse, pour éviter les vaisseaux allemands, on a fait des zigs et des zags et on est passé par le détroit du Labrador, près de Terre Neuve, tout en haut, il faisait -40.


C'était quand, juste avant la guerre ?

M. G. : Non, attendez, c'était pendant la guerre, tout de suite au début en 1940.


Si vous avez commencé en 1937, vous êtes tombé directement en période de guerre ?

M. G. : Ai eu la chance d'être payé comme engagé, et non pas comme appelé.

Mme G : On avait les anglais qui nous bombardaient tous les soirs.

M. G : J'ai été démobilisé et malheureusement je n'avais pas de boulot. Mais j'avais la chance d'avoir une connaissance était directeur de banque, le Crédit Nantais à l'époque, maintenant c'est CIO, et c'était le directeur d'ici à Brest, j'étais embauché comme employé de banque. Et figurez vous que j'y ai reçu une convocation pour le STO, vous avez entendu parler du STO, Service de Travail Obligatoire, et mon patron qui était aussi un ami, m'a dit « n'y va surtout pas », lui c'était un grand résistant. C'est ce que j'ai fait, je suis allé me planquer à Fouesnant où étaient mes parents et mon bébé qui venait de naitre, en 1943, j'y suis resté un mois et ma femme était restée à Brest, et j'ai su qu'il n'y avait pas eu d'enquête des allemands.


Alors vous avez pu revenir ?

M. G. : Effectivement je suis revenu, et le directeur de banque n'a pas pu me reprendre bien entendu, « je ne peux pas vous reprendre, je suis dans le collimateur », ma femme avait une cliente dont le mari était chef comptable à l'Energie Industrielle à l'époque, et après c'est devenu EDF, alors elle m'a pris comme gratte papier là quoi. Après ça a été nationalisé et c'est devenu EDF, je suis allé au service comptable et après j'ai terminé au service administratif, il y avait quand même 180 bons hommes à régler. On était à quatre dans le bureau, et on savait de a à z la vie de chaque individu : les naissances, les décès et ceci cela. Le boulot me plaisait parce qu'il était très varié, chaque cas était un cas particulier. C'est là que commençait l'ordinateur mais on travaillait sur des cartes perforées, tout au début, quand on les donnait aux perforatrices et qu'elles utilisaient leurs machines, ça allait sur Nantes qui était le point centralisateur J'ai fait toute ma carrière là, et juste au moment où les écrans apparaissaient, j'ai échappé aux écrans de justesse.


Vous pourriez nous décrire une journée type chez EDF ?

M. G. : Tous les jours on recevait des nouvelles, nous étions 480 en tout. Tous les jours on recevait des nouvelles de tel ou tel individu et il fallait mettre à jour.


A quelle heure vous commenciez ?

M. G. : Normalement je commençais à 8 heures. On partait à 7h30 de la maison.


Vous aviez le temps de manger, vous ?

M. G. : Oui, nous avions un resto d'entreprise.


Et le soir vous finissiez à quelle heure ?

M. G. : Cinq heures je crois. C'était pas du travail forcé, ce n'était pas des forçats. L'administration qu'est-ce que vous voulez, quoique...EDF ce n'était pas l'administration. Edf était une entreprise commerciale, on avait un statut spécial que tout le monde nous envie d'ailleurs !


Et vous avez transmis votre métier à quelqu'un ? Vous avez formé des jeunes ?

M. G. : Ah non. Je n'ai pas eu cette occasion là. Non, il fallait se former soi-même.


Le métier que vous faisiez chez EDF, c'était bien vu, c'était une bonne situation ?

M. G. : Oh, oui !!!! L'EDF c'était une bonne boite, c'est une des meilleures boites d'ailleurs, on a pris le gaz aussi, on était mixte, moi j'étais mixte parce que je m'occupais aussi des gaziers. On était 4 dans mon boulot à moi, mais on était plus au service administratif, il y avait plusieurs sections.


En dehors de votre chef, vous vous entendiez bien dans l'équipe ?

M. G. : Oh oui, sinon on n'aurait pas pu travailler correctement.

M. G. : Ma profession d'électricien gazier m'a sauvée la vie, un matin tout notre quartier a été bouclé par les troupes allemandes, contrôle d'identité. Avec la carte de l'EDF j'ai été sauvé, ils laissaient les « travailleurs utiles », on a eu la peur au ventre pendant 4 ans. Quand on allait au cinéma ou au match, on se disait, il y aura une rafle, on avait la frousse,


Votre travail était surveillé pendant la guerre ?

Ça se passait en haut lieu, pour nous, non, j'étais exécutant, c'est tout. Notre quotidien a changé car on allait au boulot la peur au ventre, les taches quotidiennes ne changeaient pas. La faim au ventre aussi.


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