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Interview-Sillage : Véronique Griner-Abraham, psychiatre au CHRU de Brest

    Sillage130 small.jpg Cet article est extrait du Magazine Sillage N°169 - mai 2014
Auteur : Élisabeth Jard



Plaidoyer pour les vieux

Sous sa plume, les rides et les folies du grand âge se disent avec la légèreté et l’humour qui ne devraient jamais quitter notre approche de la vie. Psychiatre au CHRU de Brest, Véronique Griner-Abraham a, pendant 15 ans, cheminé avec les plus vieux d’entre nous, pour tenter de panser les plaies de leurs âmes. Dans Vieillissimo, petit bouquin qui ne se prend pas au sérieux, elle raconte cette vieillesse comme personne, sur le fil d’une écriture malicieuse et tendre. Un joyeux plaidoyer pour le grand âge tout autant qu’un témoignage de santé publique poignant.

Votre livre est une véritable déclaration d’amour à ceux que le langage commun n’ose plus désigner comme les vieux ! Qu’est-ce qui vous plaît tant chez eux ?

Ce sont des gens tolérants, respectueux de l’autre, pas dans l’immédiateté de notre société où tout doit toujours aller plus vite. Ils ont cette expérience de la vie qui permet de savoir ce qui est essentiel, ce qui l’est moins.

Vous évoquez pourtant des situations qui ne prêtent a priori pas à sourire mais qui, sous votre plume, réconcilient avec les réalités de l’âge.

Je voulais lutter contre ce sentiment que beaucoup éprouvent comme : « Je ne sers plus à rien, je suis un poids pour tout le monde … ». Parce que, même si l’on ne prend plus le temps de les écouter, les vieux ont toute leur place dans la société, et beaucoup à nous transmettre !

Malgré tout, nous avons tous peur de vieillir …

Parce que l’on se projette, sans savoir. Quand vous arrivez dans une maison de retraite, vous vous dites que pour rien au monde vous n’accepteriez d’y entrer comme pensionnaire. Mais qu’en savez-vous ? Que savez-vous de leurs bonheurs, de leurs envies ?

D’ailleurs, l’amour n’est visiblement pas qu’un lointain souvenir pour beaucoup de ces vieux …

Le désir n’a pas d’âge tant que la personne reste un sujet désirant. Il est faux de penser que la vie sexuelle et affective doit s’arrêter passé un certain âge ! On ne doit pas enlever aux vieux cette dernière façon qu’ils ont d’être au monde, si c’est ce qu’ils souhaitent.

Dans ce portrait aux mille visages que vous dressez, on sent un vrai appétit de vie chez ces hommes et ces femmes.

Bien sûr ! Je crois que la plupart des gens ont envie de vivre jusqu’au bout. Souvent, je demande à mes patients s’ils ont été contents de leur vie. Bien souvent ils me disent que tout n’a pas été rose, mais qu’ils re-signeraient sans problème ! Alors, je me dis que les accompagner dans cette fin de vie, c’est important.

C’est quoi être vieux aujourd’hui ?

Tout dépend de l’histoire de chacun. Je connais des gens âgés qui ne sont pas vieux… et des gens de 30 ans qui le sont !

Votre témoignage est aussi un cri d’alerte, sur le manque de moyens alloués à la prise en charge des anciens dans notre pays.

La France ne prend pas assez en compte le vieillissement de sa population. Notamment à l’hôpital, avec des délais affolants pour une consultation en géronto-psychiatrie, un manque de structures d’hébergement temporaire… C’est comme si l’on ne voulait plus voir nos vieux. Mais une société qui ne s’occupe pas de ses vieux est une société qui va mal.

Malgré les douleurs, les tristesses, les démences, vous réussissez à toujours montrer le gai côté des gens, et des choses …

J’ai eu la chance d’avoir des grands-parents et des parents qui avaient le sens de l’humour, et je crois que cela m’aide. Et puis, je sais aussi que la vie est courte. Alors la tristesse, le pessimisme, je ne supporte pas !

Et Brest dans tout ça ?

J’ai vécu entre Brest et Lorient. Deux villes reconstruites après-guerre, et finalement… deux villes moches ! Mais Brest a aussi une vraie beauté, intérieure. C’est une ville super vivante, très riche au niveau culturel notamment. Et puis, elle n’est pas bourgeoise : j’ai vécu dans des villes qui étaient plus jolies à regarder… mais tellement guindées ! Ici, tout a été détruit, il a fallu repartir, se recréer une identité. Brest a une âme… Et si l’on est loin de tout, la richesse de cette ville vient de la pêche des gens, de leur envie de faire les choses. Et ça me plaît.

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