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De Wiki-Brest

Geneviève D., mère au foyer

Mme D.

Entretien enregistré réalisé par Dorine Caroff le 13 mars 2009 à 10H00, au domicile.


Mme Geneviève D a 48 ans, trois enfants de 19 ans, 16 ans et 9 ans. Après avoir exercé la profession d'infirmière durant 19 ans, elle est depuis 9 ans mère au foyer.



Pouvez-vous vous présenter?


Je m'appelle Geneviève D. J'ai 48 ans. J'habite à Saint-Marc. Je suis retraitée de la fonction hospitalière depuis 9 ans. J'ai trois enfants.


Qu'est ce qui vous a conduit à prendre votre retraite et devenir mère au foyer?


C'est un choix personnel et familial. J'étais infirmière et les horaires de travail n'étaient pas toujours faciles à concilier avec la vie de famille. C'est surtout ça.


Votre mari travaille?


Oui, il est cadre.


C'est aussi en accord avec lui? Ça ne lui posait pas de problème que vous deveniez mère au foyer?


Non, au contraire même! Lui non plus n'a pas d'horaires fixes, donc c'est bien plus simple quand il y a quelqu'un à la maison. Il n'y a pas d'horaires de nourrices tard le soir ou tôt le matin. C'était pour une question de facilité, ça arrangeait tout le monde : moi, mon mari, les enfants. Parce que pour eux non plus ce n'est pas désagréable d'avoir quelqu'un à la maison à la sortie de l'école.


Vous avez bien vécu la transition entre votre travail et celui de mère au foyer?


Très bien! Oui, très bien (rires). C'est un choix, je ne regrette pas.


Pendant longtemps, même encore aujourd'hui, on dit des mères au foyer qu'elles sont sans profession. Par exemple à l'école quand les enfants remplissent des fiches à l'école concernant le métier des parents...


Moi, ils mettent retraitée (rires). Je ne considère pas que je ne travaille pas. Je travaille à la maison.


Peut-on considérer que la femme au foyer a un métier, que c'est un métier à part entière?


Pour moi, oui. C'est un travail comme un autre, qui prend même plus de temps que le travail à l'extérieur. Pour moi, je travaille. J'ai un petit salaire de ma retraite, plus les allocations familiales. Je considère que ça fait partie de mon salaire aussi. Oui, pour moi, je travaille.


C'est même plus difficile par rapport à votre ancienne profession?


Ce n'est pas plus difficile, mais c'est 24H sur 24. Il n'y a pas d'horaires de début et d'horaires de fin. C'est un travail à temps plein.


Le fait d'être à la maison en permanence, peut-on considérer que la mère est le pilier de la famille?


Oui, du coup, je gère la maison, les enfants, le budget. Je gère vraiment de A à Z la maison.


Le fait d'être mère au foyer peut-il être synonyme de restrictions au niveau financier, social?


Je pense c'est au niveau du couple, c'est un accord. Moi, je gère les comptes. Donc à la limite, c'est mon mari qui dépend de moi financièrement (rires). Je suis sûre qu'il ne sait même pas combien on a sur le compte aujourd'hui. C'est une histoire personnelle dans le couple. A partir du moment où on considère qu'être à la maison c'est un travail, tout l'argent qui rentre à la maison va autant à la femme qui est à la maison que à l'homme qui travaille. C'est une question entre personnes. Il y a des couples où c'est l'homme qui s'occupe entièrement des comptes. Oui, là, la femme peut se sentir socialement diminuée. Enfin moi, ce n'est pas du tout mon cas (rires).


Au niveau social, le fait d'être à la maison, on voit moins de monde, alors que lorsque on travaille, on est avec une équipe, cela n'a pas changé à ce niveau là?


Non, car au niveau de l'école, on peut plus participer à la vie de l'école. On rencontre les parents plus facilement. Nous, on a l'avantage que c'est une petite école de quartier. Donc les enfants ne changent pas. Ma fille est avec les mêmes enfants depuis le début de la maternelle. Avec les parents on se connait tous, on se voit en dehors, il y a un tissu qui se crée. C'est devenu des amis. Moi, je n'ai pas l'impression d'être coupée de l'extérieur et d'être enfermée dans ma maison.


Quand vous avez décidé de devenir mère au foyer, qu'elle a été la réaction de votre famille, de vos amis? Quelle est l'image rendue par votre statut?


Je n'ai pas eu de réflexion. Au contraire, on me disait que j'avais de la chance de pouvoir rester à la maison. Il faut dire que les horaires de l'hôpital ne sont pas faciles, entre les weekend-end, les dates de vacances. Au niveau de mes collègues de l'hôpital, ils me disaient : «Â T'as de la chance, c'est bien, t'as raison d'arrêter ». Ma famille...je n'ai pas eu de commentaires (rires). Et puis, ça nous regarde nous, cela m'est égal l'opinion des autres, ce que pensent les gens.


Dans notre société, les femmes travaillent plus, elles ont des positions plus élevées, donc l'image de la femme au foyer peut être diminuée. Et de ce fait, elle n'est pas mise en valeur par rapport au travail qu'elles font...


Oui, ce n'est peut-être pas mis en valeur. Mais, moi je considère qu'on a autant de valeur en étant à la maison qu'au travail à l'extérieur. Ça ne change pas.


N'avez-vous pas peur du départ des enfants par la suite. Car là, vous avez prit un rythme, de même lorsque votre mari sera en retraite? Cela va surement changer?


Comme n'importe quelle retraitée qui a travaillé jusqu'à 55 ou 60 ans. C'est pareil, je serais en retraite le jour où mes enfants ne seront plus à la maison. On en a encore pour un moment. Ce sera comme si j'avais travaillé jusqu'au jour où le dernier partira. Et après ce sera une retraite normale comme tout un chacun.


Être femme au foyer est donc bien un métier?


Oui, c'est un travail, c'était choisi. Je peux retourner travailler quand je veux. Ce n'est pas une contrainte, ni une obligation, c'est vraiment un choix.


Conseilleriez-vous ce choix à d'autres personnes? Le fait d'avoir travaillé avant, cela a été plus facile?


Oui, surement, le fait d'avoir travaillé, c'est surement plus facile d'arrêter que de n'avoir jamais travaillé. J'ai la chance comme j'étais dans la fonction publique, d'avoir une petite retraite au bout de 19 ans de travail. De même que je peux retravailler tout en conservant ma retraite. C'est un choix et au niveau de l'hôpital, je connais d'autres infirmières qui ont fait de même : arrêter au bout d'un certain nombre d'années avec trois enfants. Car ce n'est pas toujours facile de gérer les horaires de l'hôpital, quand on a pas un mari avec des horaires réguliers. Ce n'est pas évident de gérer les enfants.


Pensez-vous qu'il y ait eu une évolution de la femme au foyer depuis les années 60/70?


Oui. Je pense que cela a évolué. C'est surtout au niveau de la dépendance financière. Il y a aussi beaucoup de femmes au foyer qui ont fait le choix de rester au foyer. Alors qu'il y a 20/30/40 ans, ce n'était pas un choix. C'était en grande majorité systématique. Il n'y avait pas beaucoup de femmes à travailler à l'extérieur, ou par obligation. J'ai la chance de ne pas être obligée financièrement de travailler. C'est un choix.

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