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Françoise Bachelier, vice-présidente de BMO

Mme BACHELIER

Entretien enregistré réalisé par Dorine Caroff le 26 mars 2009 à 10H00 à Brest Métropole Océane.

Françoise Bachelier a 57 ans. Elle est aujourd'hui en retraite après avoir exercé le métier de professeur des écoles. La politique a toujours fait partie de sa vie, puisqu'elle fût entourée de personnes investies en politique : son père, puis son époux. Après s'être investie dans le milieu associatif, elle se tourne à son tour vers la politique, tout d'abord au sein d'un parti politique (pas), puis au sein de la municipalité de Brest en 1995. Aujourd'hui elle est vice-présidente de Brest Métropole Océane, chargée de la délégation de l'égalité entre les femmes et les hommes dans la vie locale.



Pouvez-vous vous présenter?


Je suis Françoise Bachelier, je suis aujourd'hui vice-présidente de Brest Métropole Océane, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes dans la vie locale.


Avez-vous exercé une profession?


Oui, j'ai toujours exercé une profession, j'étais enseignante : institutrice, puis professeur des écoles, puisqu'on a eu droit à une revalorisation de carrière. Maintenant je suis retraitée de l'éducation nationale, j'ai bénéficié d'un départ en retraite de bonne heure, puisque j'avais eu la chance de rentrer à l'Ecole Normale, quand elles existaient encore.


Quand on a commencé votre engagement en politique? Ce qui vous a conduit à la vice-présidence de BMO?


L'engagement politique pour moi ça date de toujours. J'ai dû tomber dedans quand j'étais petite puisque j'avais un papa qui était conseiller municipal à Huelgoat, une petite ville, mais quand même! Chez moi, on a toujours parlé politique, on s'est toujours informé, on a toujours lu les journaux. J'ai baigné là-dedans. Par contre mon père n'a jamais été dans un parti politique. Sans perdre de vue la politique, je me suis orientée vers l'associatif et c'est par l'associatif que je me suis retrouvée sur la liste de Pierre Maille en 1995. C'est une amie, Mme Lagadec qui m'a téléphoné un dimanche matin pour me dire : «Â Moi, je me représente pas aux élections, j'aimerais trouver une femme pour prendre ma place sur la liste, est-ce que tu est d'accord? ». Puis voilà, c'est parti comme ça. J'ai hésité, j'ai consulté ma famille, j'ai dis oui et j'entame mon troisième mandat. Et ma foi, je ne regrette rien.


Cette délégation date de quand?


Cette délégation à l'égalité entre les femmes et les hommes date des dernières élections de 2008. Cela n'existait pas à Brest avant. Cela existait dans d'autres collectivités. A la fin du dernier mandat, on a été quelques élues à réfléchir à cette délégation et à demander à ce qu'elle se crée. Cela a été un peu long, mais cela c'est fait. Finalement, François Cuillandre a accepté que cette délégation se fasse. On en a même fait un point assez fort du mandat puisque c'est un des thèmes porteurs de l'Agenda 21. 1.


C'est une majorité de femmes qui a demandé à ce que soit créer cette délégation?


C'est plutôt des femmes, mais de toutes les composantes politiques de notre liste. On est une liste d'Union de la gauche. Les femmes de toutes les composantes de la liste ont fait la demande séparément. Chacune montait au créneau régulièrement pour que ça reste d'actualité. Ce n'est pas sous la pression car c'est vraiment une volonté de travailler sur cette thématique. Cela a été une demande très appuyée.


Comment a-t-elle été perçue par les hommes au sein de BMO?


Si ça leur a posé soucis, ils ne l'ont pas dit. Nous, on avait fait les demandes. On avait remonté plusieurs fois, on a laissé l'idée germer, car ce n'est pas si simple quand il faut organiser une collectivité. On sait qu'il y a plusieurs délégations à créer. Cette délégation aurait pu être associée à une autre par exemple, comme c'est le cas dans certaines villes, où c'est associé à la discrimination. Personnellement, je ne le souhaitais pas. Cela a été beaucoup discuté dans les instances de décisions. S'il y a eu difficultés, je n'en ai pas eu vent. Je sais que François Cuillandre qui était notre tête de liste y tenait. De même que Bertrand Uguen, notre directeur général des services. C'était déjà quasiment gagné sous cet angle là. Par contre, depuis que la délégation existe, j'ai remarqué que les élus hommes avaient un très bon retour aussi sur cette idée. Chacun dans leur délégation font remonter des choses, viennent dire : «Â On pourrait faire ça, ... ». Les hommes sont aussi impliqués que les femmes.


Quelles sont les missions de cette délégation?


C'est récent, on est pas encore lancé dans quelque chose d'extraordinaire. Le fonctionnement est très transversal. Si on veut travailler sur l'égalité entre les femmes et les hommes, ce n'est pas une personne toute seule dans son coin qui va le faire. Ma mission première est de convaincre et de faire participer tous les élus, car c'est eux qui sont aux prises de décisions, ce qui est important, et les services. En particulier les responsables des différents services de la collectivité. Car l'égalité passera par tout ce que l'on va faire dans tous les domaines. C'est l'état d'esprit de la mission. Concrètement, pour démarrer, on a adopté au mois de décembre et signé officiellement le 20 mars, la Charte Européenne pour l'Egalité des Femmes et des Hommes dans la vie locale. 2. Cette charte est un document qui a été rédigé par 21 pays de l'Union Européenne, conjointement en plusieurs années. Elle a été finalisée en 2006, c'est une charte qui reprend toutes les missions d'une collectivité locale et tout ce qu'elle peut faire pour aller dans ce sens. Pour améliorer ce qui se fait déjà. Car il y a déjà beaucoup de choses qui se font. Pour aller se poser des questions sur certaines politiques pour lesquelles on se serait peut-être pas posé des questions de l'égalité de genres. C'est important car cela donne une vision assez globale de tout le travail que nous avons a mené et des directions dans lesquelles nous devons travailler. La signature de la charte ne nous engage que moralement, il n'y a pas de contrat, de convention, car c'est une charte réalisée par le Conseil des Communes et des régions d'Europe, donc l'application est financée par l'Union Européenne. On doit d'ici deux ans rédiger des plans d'action dans différents domaines : politique, collectivité en tant qu'employeur. On a quand même 3300 agents. Le domaine de nos politiques publiques est tout ce qui touche aux relations avec les partenaires qui travaillent sur la collectivité : associations, justice, police, syndicats, tout ce qui concerne particulièrement les violences, la pauvreté,...Nous allons très vite réaliser ce plan d'action. Nous espérons commencer à le rédiger avant la fin de l'année. Ce qui n'empêche pas qu'on commence déjà à faire des actions, puisque on a démarré un état des lieux. Car il faut commencer par là quand on veut faire un plan d'action, il faut savoir d'où on part pour savoir où on va. Un état des lieux qui a été fait par des étudiants de Master 1 et 2 en sociologie.3. Puis, on va tirer des conclusions et voir ce qui est le plus urgent, ce qu'on peut faire tout de suite, sans avoir à investir ou trop d'argent ou trop d'énergie.


Aurait-on pu imaginer que ce soit un homme qui soit à la tête de cette délégation?


A ma connaissance, dans aucune collectivité locale où il y a cette délégation, il n'y a d'hommes. Pas d'élus en tout cas, quelques fois ce sont des hommes qui sont chargés de mission auprès des élues. Mais pourquoi pas ? Je pense qu'il y a des hommes et j'en connais quelques uns parmi mes collègues élus qui auraient été tout à fait capables de mener cette mission.


Étant donné que l'on parle de l'égalité Hommes/Femmes, c'est un travail qui se fait avec les deux?


Oui, c'est un travail qui se fait autant avec les femmes que les hommes, sauf que quand on fait des constats et des états des lieux aujourd'hui, on sait que ce sont plutôt les femmes qui en subissent les conséquences. Cela ne veut pas dire que les hommes ne sont jamais concernés, au contraire. Ce qui est important dans ce travail, c'est de bien expliquer, car il faut faire œuvre de pédagogie à certains moments pour ne pas apparaître comme des féministes méchantes et vilaines. Et que les hommes ont aussi à gagner de cette égalité.


Cela peut être le risque, de créer cette délégation qui peut avoir une image de féministe, en prenant le pouvoir?


Oui, certains le craignent, c'est assez légitime car à partir du moment où on demande l'égalité...On demande la similitude. Les femmes et les hommes ne seront jamais identiques, il y a des grandes différences biologiques qui font qu'on ne pourra jamais être sur un pied de similitude. Par contre d'égalité oui, de salaires, de prises de décisions, pourquoi pas? Il n'y a aucune raison, rien ne s'oppose au fait qu'une femme puisse avoir des postes de décisions, qu'elle ait un salaire égal à celui des hommes. Rien ne s'oppose à ça, si ce n'est des pratiques un peu ancestrales qui ont du mal à évoluer. C'est vrai que ça peut déranger car forcément, ça va bousculer des pratiques, remettre en cause des choses qui se font aujourd'hui et dans lesquelles certaines personnes se complaisent. Cela va bousculer les habitudes, sans pour autant ni rabaisser les uns, ni rabaisser les autres, ce n'est pas l'objectif.


Vous avez commencé votre engagement politique alors que vous travailliez toujours, cela n'a-t-il pas été difficile de concilier les deux? De même que votre vie de famille?


Cela n'a pas toujours été simple, mais je dois avouer, je ne sais pas si tous les hommes font pareil, pas tous je suppose. Avant de prendre la décision d'accepter d'être sur la liste, j'ai consulté ma famille : mon mari, mes enfants. Mes filles étaient déjà grandes à l'époque, mais je savais que j'engageais toute la maisonnée.


Notamment sur ce point, on peut voir une différence entre les hommes et les femmes : un homme qui s'engage en politique ne va pas forcément voir cet aspect?


Je modèrerais. C'était sans doute vrai avant, des gens de ma génération. Je crois que des jeunes hommes aujourd'hui qui s'engagent en politique, ils font attention. Je vois mes collègues plus jeunes qui ont des enfants en bas âge, quand c'est leur jour de garder les enfants, c'est leur jour. Ces hommes qui sont en politique ont aussi des femmes qui sont engagées par ailleurs dans d'autres choses. Je me souviens quand j'ai débuté, d'entendre mes collègues élus d'un certain âge, dire : «Â Oh, ce soir ma femme a préparé ça à manger... ». Je crois qu'aujourd'hui ce n'est plus vrai. Mais je savais que j'engageais la vie de famille, j'ai la chance d'avoir un mari très militant, pour lui ça n'a pas posait de problème au moment de l'engagement. Mes filles, ça leur plaisaient aussi, cela aurait peut-être différent si j'avais eu un garçon. Mais ça n'a pas toujours été facile, il y a eu des moments un peu difficiles. Au début, on part sans trop réfléchir, on se laisse embarquer, c'est passionnant, c'est intéressant et on se rend compte qu'on néglige petit à petit certaines choses. Il y a un moment où il faut recadrer. Par rapport au travail, j'ai eu la chance d'être dans l'Education Nationale, ce qui était plus facile en étant élue. J'ai eu un peu de mal à négocier avec mes supérieurs, mais j'ai eu des aménagements d'horaires qui m'ont permis de faire les deux.


Votre profession a joué un rôle dans votre engagement en politique?


Je ne crois pas, c'est plus parce que la politique était quelque choses qui m'intéressait. De part mon éducation, j'ai baigné dedans. Je me suis mariée avec quelqu'un qui était engagé en politique, dans un parti. Il y a toujours eu un engagement politique, syndical, associatif.


Le fait que votre mari soit engagé en politique, cela a été plus facile?


Peut-être. S'il n'avait pas été engagé en politique, peut-être qu'il aurait moins bien accepté. Car pour lui, c'était aussi une remise en question de certaines choses. Même si chez nous le plan de l'égalité n'était pas une question qui se posait, il s'est retrouvé à faire plus de choses que moi à la maison et c'est toujours le cas.


Le fait que vous soyez une femme, cela vous a posé des difficultés quand vous vous êtes engagée en politique?


Je n'ai jamais eu l'impression d'être discriminée en politique parce que j'étais une femme. Mais quand je suis rentrée en 1995, c'était Pierre Maille qui était tête de liste, et il n'y avait pas encore la parité. 4. On était déjà pas mal de femmes sur la liste, alors que la loi n'était pas encore sortie. On a tout fait pour nous mettre à l'aise, on était quelques nouvelles femmes sur la liste et cela c'est bien passé. Après, on prend sa place. Quelques fois oui, j'ai pu avoir l'impression que d'être une femme pouvait poser des problèmes, mais pas par rapport à mes collègues élus. Je l'ai ressenti par rapport à des gens qui travaillent dans la collectivité. Il y a des personnes qui sont des machos, il faut le reconnaître. Mais quand ça c'est produit, j'ai trouvé des appuis à côté pour m'aider à réagir, car ce n'est pas facile. Quand c'est François Cuillandre qui est devenu tête de liste, ça n'a pas changé non plus. Après j'ai été adjointe au maire, chargée des Relations Internationales, dans ce cadre là non plus , je n'ai pas eu l'impression d'avoir été discriminée. Il y aussi la façon dont on se place qui fait ce que l'on est.


Et par rapport aux habitants que vous pouvez rencontrer?


Non, j'ai plutôt eu des retours positifs sur ce plan là. Notamment, je me souviens des premiers mariages que j'ai pu faire, où les gens disaient : «Â On est content d'être mariés par une femme ». Globalement, quand j'ai reçu des gens, notamment des populations étrangères dans des conditions difficiles, cela se passait bien. Les seuls moments où j'ai pu avoir du mal à me légitimer c'est quand je m'occupais des jumelages. J'allais en Afrique, et c'est vrai que là-bas, le fait d'être une femme, ça enlevé un peu de légitimité. On me disait : «Â Tu vas en Afrique, tu emmènes ton écharpe ». C'est un symbole. Par contre, j'ai fait de la politique avec mes tripes, je prenais le temps de rencontrer les gens, des associations. C'était quelque chose de très important pour moi. J'étais plus orientée vers la relation avec les citoyens, qu'impliquée dans les hautes sphères de mon parti. C'est des choses qui m'intéressent plus maintenant parce que j'ai plus de temps, mais avant je ne pouvais pas tout faire.


Vous êtes rentrée sur les listes en 1995, mais vous étiez déjà engagée auparavant?


Oui, j'étais déjà engagée en politique.


Il y avait déjà des femmes dans ce parti? Car on a le droit de vote et d'éligibilité depuis 1944, mais ce n'est pas pour autant que les femmes se sont engagées en politique...Comme vous avez pu le dire, Mme Lagadec vous a appelé de peur qu'il n'y ait plus de femmes?


C'était son inquiétude, elle était dans un mouvement «Â Brest Nouvelle Citoyenneté », que j'ai quitté après, pour des questions internes. J'avais des problèmes relationnels avec quelqu'un qui ne m'a jamais considéré comme son égal, mais avant tout comme une femme. J'ai du partir parce que je ne trouvais pas ma place. C'était quand même un engagement important, j'y mettais beaucoup d'énergie et je ne voulais pas en perdre dans des problèmes comme ceux-là. Je suis rentrée au Parti Socialiste, mais je ne suis pas allée dans les instances. Je n'ai pas essayé d'avoir des postes à responsabilité.


Quand vous étiez dans ce parti, la parole des femmes étaient aussi bien entendue que celles des hommes?


Cela dépendait des personnes, plus ou moins. Globalement, c'était plutôt bien. Mais il y aussi des gens qui sont allergiques aux femmes, il y en a de moins en moins heureusement. Et ceux qui le sont essaient de se corriger aujourd'hui, donc c'est plutôt bien. Mais c'est aussi vrai dans le sens inverse, on entend des femmes tenir des propos abominables sur les hommes. Je crois qu'il y a des clichés qui deviennent des généralisations, et il faut faire attention.


On voit les femmes dans les manifs, elles militent, mais elles ne s'investissent pas en politique, vous pensez que c'est dû à quoi?


C'est vrai que c'est un constat. Les femmes sont beaucoup dans les associations, je crois qu'il y a autant, si ce n'est plus de femmes qui sont adhérentes d'associations. Mais on ne les retrouve quasiment pas dans les conseils d'administration, encore moins à la présidence. C'est un constat, et c'est aussi un travail à faire, d'aller voir pourquoi les femmes ne prennent pas de responsabilités dans les associations. Quand on voit les chiffres de la part domestique faite par les femmes et les hommes, on peut imaginer qu'il y a un peu ça derrière. 5. Elle veulent bien aller dans les associations, car ça les intéressent, elles veulent avoir des activités, mais que prendre une responsabilité c'est du temps, et que ce temps, elles ne l'ont pas forcément. Mais elles ne l'ont pas peut-être parce que l'équilibre des tâches à la maison n'est pas fait. C'est des questions qu'il faut se poser, mais on sait bien que l'on ne peut pas faire de lois pour obliger les hommes à partager les tâches ménagères. Le problème est là. Ou elles disent : «Â Je vais quand même et ça va se faire à la maison ». Ou elles attendent que ça se fasse tout seul avant de s'engager. Mais à mon avis, il y en a qui ne s'engageront jamais.


Ne pensez-vous pas que c'est aussi dû à l'image de la politique, qui est associée au pouvoir?


Oui, il y a aussi cela. On dit qu'elles sont moins attirées par le pouvoir ou par les responsabilités. Mais quand elles y sont , elles y sont bien. Je n'ai pas vu beaucoup de femmes partir car ça ne leur plaisaient pas. Elles partent parce que elles estiment qu'elles ont atteint l'âge, elles ont trouvé d'autres engagements. On sait aussi que les femmes hésitent toujours à s'engager parce que elles sont beaucoup moins confiantes dans leurs compétences que les hommes. Elles disent : «Â Non, je ne saurais pas faire ». C'est ce que moi-même j'ai dit à Mme Lagadec! Quand on va les chercher, et qu'on leur dit qu'elles sont capables, elles se rendent compte qu'elles le peuvent. Et elles y prennent goût autant que les hommes. C'est un travail à faire dans les partis politiques, leur dire d'oser, de se présenter, de se mettre avant. Il faut être visible, et avoir sa place sur les listes électorales. Il y a vraiment un problème de confiance, et on pourrait remonter loin. On sait aussi qu'il y a une part de l'éducation là-dedans. Les petites-filles et les femmes ont globalement moins confiance en elles. Il y a une étude qui a été faite par Isabelle Germain, une journaliste, qui montre que quand un homme postule pour un poste, s'il estime qu'il a 50% des capacités pour le poste, il postule. Une femme, il faut qu'elle estime avoir 80% des capacités. Quand on postule pour être élue, on ne sait pas ce qu'il y a derrière, donc si tout de suite, on commence à se dire : «Â Je ne sais pas... ». Donc c'est notre travail à nous, de femmes élues dans les partis, de leur dire qu'elles sont capables. Une fois qu'on y est , il faut aider les autres.

Mais les choses changent. Aux dernières élections, puisque les listes sont paritaires, il y a eu largement plus de candidatures qu'il y avait de postes. Ce qui n'était pas le cas en 2001, bien que les listes étaient déjà paritaires.


Cette loi du 8 juillet 1999 a changé ces chiffres? Est-ce que les femmes ont plus osé?


Oui, c'est vrai qu'il y a des femmes qui se sont autorisées à se présenter. Qui ne l'auraient pas fait, car elles ne voulaient pas rentrer en conflit. Moi dans mon parti politique, aux dernières élections, il y avait beaucoup de femmes. C'est important, car les femmes qui se sont portées candidates une fois, même si elles n'ont pas été retenues, on peut imaginer qu'elles se représenteront. Et ces femmes là peuvent s'autorisaient à s'intéresser à ce qui se passe,et c'est un engrenage. Cette loi a permit quelque chose d'important, c'est que dans l'exécutif, dans les postes d'adjoints au maire, il y a autant d'hommes que de femmes. On peut toujours dire qu'il y l'égalité sur les listes, mais si on donne tous les postes d'adjoints aux hommes, le pouvoir est là, mais les femmes ne sont pas dans les décisions. C'est important que les décisions soient prises par un groupe mixte.


Vous pensez qu'aujourd'hui les femmes ont trouvé leur place en politique?


Je pense qu'aujourd'hui, les femmes s'autorisent plus à faire de la politique et à donner leur avis. Même si en réunion, on voit que c'est encore une grande majorité d'hommes qui s'expriment.


Comment se fait-il qu'elles ne s'expriment pas dans les réunions?


Il n'y a pas vraiment d'explications. J'ai assisté à une conférence d'un sociologue, Xavier Dunezat, qui disait «Â que dans les associations de chômeurs et de sans-papiers, on remarque souvent que ce ne sont pas les chômeurs ou les sans-papiers qui prennent la parole mais des hommes, blancs, souvent issus de l'enseignement. C'est toujours le même type de personnes qui prend la parole. On demande souvent aux femmes de faire le café, le couscous,... » Les femmes ont du mal à prendre la parole en réunion. J'essaie de l'observer, j'ai remarqué que lorsque on débat d'un sujet, les gens qui ne sont pas d'accord vont donner leur avis. Mais en général, les femmes qui sont d'accord ne vont rien rajouter, mais les hommes même s'ils sont d'accord vont prendre la parole pour dire la même chose, et surenchérir. Alors prennent-ils la parole juste pour prendre la parole? Mais il faut que les femmes le fassent aussi. On ne se rend peut-être pas bien compte que la prise de parole dans une réunion, c'est un acte que l'on pose. Je l'ai vu aussi physiquement, lorsque je suis arrivée sur la liste, pour les photographies. Des collègues nous avait prévenu de nous mettre devant car certains hommes allaient essayer de se mettre devant si on ne jouait pas des coudes. C'est des choses qu'il faut apprendre à un moment, car si on ne s'exprime pas, si on ne se montre pas, on n'existe pas. Il faut à un moment être visible sans être forcément agressive. Il y a aussi la non-expérience du fait que les femmes n'étaient pas présentes en politique. Pendant longtemps, c'était les femmes «Â de » ou co-optées par des hommes. Maintenant, il y des femmes qui sont là sans mentors, mais parce qu'elles le veulent.


Quelle est cette vision de ces femmes là, qui «Â rentrent » sans mentors?


La co-optation existe toujours. Les hommes savent aller chercher les femmes quand il y a besoin. Ils essaient quand même de faire le choix. Ce n'est pas vrai pour tous, mais si on leur dit qu'il faut mettre une femme à un endroit, ils vont aller chercher celle qu'il faut. Et si une autre arrive, on lui dit : «Â ben non, t'es pas légitime ». Mais ça se passe de moins en moins car les femmes aussi peuvent le faire...Il y en a qui viennent un peu déranger un ordre établi.


Quelle est l'image d'une femme qui s'engage en politique?


Cela dépend pour qui. Pour mes filles cela a été important, elles connaissaient mes opinions. Elles ont trouvé ça très bien. Ma mère beaucoup moins bien, elle était persuadée bien qu'elle était épouse d'un homme qui a fait de la politique toute sa vie, de l'associatif, du militantisme, que ce n'était pas la place d'une femme. Que mon mari allait partir car je n'étais jamais à la maison. Quand elle voulait me joindre, j'étais pas à la maison, et quand elle m'avait elle disait : «Â Ah t'es là, parce que t'es pas souvent à la maison ». Et on s'affranchit de ses parents. Mon père était très fier, il aime bien voir ma photo dans le journal! Pour lui c'est une reconnaissance de l'éducation qu'il a pu me donner. Chez moi il y avait deux filles, et on a jamais été élevées dans l'idée que on pourrait être femme au foyer. On nous a préparé à avoir un métier, même si ma mère était à la maison.


L'éducation à l'école joue aussi?


Oui, mais il y a encore du travail à faire, y compris au niveau de la maternelle. L'école maternelle et primaire ont un gros problème aujourd'hui, c'est qu'il n'y a quasiment pas d'hommes, ni dans l'enseignement, ni dans les postes d'aide-maternelle, ou peu. On sait que quand il y a des hommes, cela ne fonctionne pas de la même manière. Il y a bien sûr des enseignantes très engagées sur ce niveau. Il y a aussi un problème sur l'orientation. Aujourd'hui, on demande à des jeunes de faire des choix de vie quand ils sont en pleine construction de leur identité. C'est très difficile pour eux, de faire des choix différents des codes qui existent dans la société. C'est pour ça que les filières sont si sexuées. Si un garçon qui est en troisième dit : « Moi je veux être infirmier, travailler dans les écoles », ça va être difficile pour lui. L'inverse est vrai pour les filles aussi. Tant qu'on garde l'idée d'être comme ses pairs, on a du mal à faire des choix différents. Et les filles n'ont peut-être pas encore assez l'idée d'aller dans des carrières techniques, technologiques. De même pour les garçons en littéraire. En fait, ce n'est pas tellement qu'il manque des filles dans les carrières scientifiques, mais c'est qu'il manque de garçons dans les autres formations : littéraire, social. J'ai vu en maternelle, il y a un coin cuisine, un coin garage, quand le coin garage est investi par les garçons, les filles ont du mal à y entrer, l'inverse se voit aussi. On est obligé de faire des moments non mixtes, car les garçons aussi ont besoin d'aller dans le coin cuisine. Il y a des schémas que l'on ne peut pas effacer du jour au lendemain. On sait qu'on a plus de tolérance vis à vis des bêtises des garçons par rapport aux filles.

Il y a une crainte de bouleverser les choses, il faut que les hommes se remettent en question sur certains points. C'est un travail qui se fait avec les hommes. Cela permettra aussi à des hommes de trouver une place qu'il n'aurait pas eu, dans leurs carrières ou dans leurs familles.




1. L'Agenda 21 est un plan d'action pour le XXI ème siècle, établi lors de la Conférence des Nations nies sur l'Environnement et le Développement en 1992. Les Nations engagées doivent appliquer ce plan d'action au niveau national, régional et local.

2. La Charte Européenne pour l'Egalité des Femmes et des Hommes dans la vie locale a vu le jour en 2006. Elle vise à inciter les dirigeants locaux et régionaux d'Europe à s'engager à prendre des mesures concrètes en faveur de l'égalité hommes /femmes.

3. Le personnel masculin et féminin de BMO a remplit un questionnaire concernant leur travail, leur vie quotidienne.

4. Au début des années 1990, il y a une volonté d'une parité dans la représentation politique. Il y eut de nombreux débats qui conduisirent à la loi du 8 juillet 1999, «Â relative à l'égalité entre les hommes et les femmes ». Les articles 3 et 4 indiquent que «Â la loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et à la fonction électorale ».

5. D'après l'enquête «Â Emploi du temps » de l'INSEE, en 1999, de 1896 à 1999, les femmes assurent 80% du travail domestique.

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