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De Wiki-Brest

Brest, Port transatlantique ?

De par sa situation, Brest aurait du jouer un grand rôle dans le trafic de passagers entre la France et New York. Il y a bien eu des tentatives, mais elles ont échoué. Pourquoi ?

La concurrence du Havre

La première ligne régulière transatlantique entre la France et l'Amérique a été établie par des marchands américains en 1822. Ils choisissent Le Havre comme port sur le Vieux continent. Très certainement, car c'est le port le plus proche de Paris (qui plus est, avec une bonne desserte fluviale). Dix ans plus tard, c'est une flotte américaine de 16 paquebots à voiles qui assure 3 à 4 traversées mensuelles. En juillet 1840, le gouvernement français décide de briser ce monopole américain en autorisant la création d'une ligne française vers New York avec des bateaux à vapeur au départ du Havre[1]. Mais il faudra attendre 1864 pour que le projet se concrétise vraiment.

Entre-temps, les travaux du Port-Napoléon dans l'anse de Porstrein (l'actuel port de commerce) ont démarré, ainsi que ceux de la ligne de chemin de fer Paris-Brest. Désormais, Brest dispose d'atouts pour concurrencer Le Havre. Aussi, en 1861, sur l'impulsion du comte de Tromelin, député de Morlaix, le gouvernement de Napoléon III vote que la future ligne Le Havre - New York fasse escale à Brest [2]. Victoire de courte durée pour les brestois. En 1875, Le Havre obtient en effet la suppression de cette escale. Voir son histoire au chapitre 3.

Mais Brest n'abdique pas. D'abord ce sera une tentative - malheureuse - de création d'une ligne New York – Brest en 1867 (voir ci-dessous chapitre 4).

La mise en service de la forme de radoub n°1 en 1913 est principalement motivée par l'espoir de traiter les grands navires transatlantiques [3] et l'installation en 1912 de cloches sous-marines à l'entrée de la rade de Brest vise à guider les navires par temps de brume (principal danger reproché à Brest).

Plusieurs rapports viennent appuyer les ambitions brestoises (une synthèse des avantages du port de Brest figure au chapitre 2). Et de nombreuses personnalités vont intervenir en sa faveur. Entre autres :

- Louis Pichon, maire de Tréflez, à peine élu député en 1897, dépose une « proposition de loi ayant pour objet la mise en adjudication du service maritime postal entre la France et New York », monopole alors du Havre, mais dont la concession arrive à échéance en 1898 [4].

- Le rêve transatlantique continue avec le comité « Brest-Transatlantique » de 1907, auquel le sénateur Vice Amiral de Cuverville apporte son soutien. Toujours le même enjeu : le renouvellement de la convention postale (prévue en 1911) [5]. Ce comité publie un rapport très détaillé de 52 pages largement diffusé [6].

- En mars 1909, Y.M. Goblet, un professeur parisien, rédige un long article intitulé "Brest, tête de ligne des courriers transatlantiques". Il conclut par "c'est une question d'intérêt national" [7].

- Claude Casimir-Périer, fils de l'ancien président de la République, est le dernier grand défenseur du port brestois face à son concurrent havrais. Pour répondre aux déclarations des parlementaires qui dénoncent les « illusions brestoises », il publie en 1914 un ouvrage conséquent (600 pages), « Brest, port transatlantique : projet de réorganisation des services maritimes et des chemins de fer français » (chez Hachette)[8].

Tout ceci malheureusement sans résultat.

La 1ère guerre mondiale leur a pourtant (indirectement) donné raison. En effet, entre 1917 et 1919, Brest a montré sa capacité à accueillir les plus gros paquebots du monde. Rien qu'en 8 mois, à la fin de la guerre, 773 355 soldats américains embarquèrent pour regagner leur patrie (plus de 3000 par jour) [9]. Le Havre n'a jamais connu un tel trafic passagers !

A noter que Brest fut aussi en concurrence avec Cherbourg pour les traversées transatlantiques. Ainsi, en 1913, 6 grandes compagnies étrangères fréquentent Cherbourg. La compagnie anglaise Cunard en fait une escale de sa ligne Southampton – New York jusqu'en 1994. Cherbourg devint même le principal port d'immigration du Continent dans les années 1922- 1925.

Les atouts de Brest

Ce chapitre est en cours de développement à partir des nombreux rapports rédigés entre 1850 et 1910



Brest, escale de la « Transat » vers New York

La Transat, de son vrai nom, la Compagnie Générale Transatlantique Wikipedia-logo-v2.svg, est créé en 1855. Elle obtient du gouvernement français la concession de plusieurs lignes transatlantiques, dont un Le Havre - New York.

Le Washington, un vapeur de 105 m de long propulsé par des roues à aubes, entame sa croisière inaugurale le 15 juin 1864 et ouvre la liaison entre Le Havre et New York en 13 jours et demi, avec une escale de 24 heures à Brest [10]

D'autres paquebots de la Transat feront escale à Brest : Le Lafayette, L'Europe, Le France (déjà!), Le Pereire, Le Ville du Havre, Le Ville de Paris, Le Panama, Le Saint Laurent, L'Amérique. [11]

Brest était à l'origine prévu comme une escale postale (le mot « paquebot » ne vient-il pas de l'anglais « packet-boat », l'équivalent de la « malle poste » sur terre ). Objectif de cette escale : accélérer la transmission de courriers entre Paris et les Etats-Unis. [12]. En effet, Brest est relié à Paris par le télégraphe de Chappe, ce qui procure un gain d'au moins 12h par rapport au Havre dans la transmission des dépêches.

Cette escale rencontre aussi un certain succès auprès des passagers, puisque de 1865 à 1872, on note le débarquement de 10 208 personnes à Brest, contre 13 265 au Havre [13]. En effet, le train est arrivé jusqu'à Brest en avril 1865. Problème : le trajet Paris-Brest est alors très inconfortable. Et surtout très long (16h40 pour les premiers trains !) (source 25 ?), beaucoup plus long que le trajet Paris - Le Havre. La gare maritime prévue n'a jamais été construite, et les quais, pourtant envisagé dès 1857 pour les paquebots, n'ont été aménagés que bien plus tard (1917 ?). Ceci nécessite donc un transbordement en rade.

En outre, les tarifs ne sont pas attractifs. Malgré 2 nuits en moins à bord, un Paris – New York via Le Havre ou via Brest coûte le même prix [14].

Pour les passagers havrais, cette escale allonge la durée du voyage. Et contrairement aux espoirs brestois, il n'y a quasiment aucun fret. Enfin, le succès des transmissions par câbles télégraphiques transatlantiques (opérationnels dès 1866) a réduit son intérêt pour les courriers postaux.

Aussi, après 10 ans de fonctionnement, la Transat demande l'annulation de l'escale brestoise. Le 31 octobre 1874, une dépêche ministérielle autorise sa fermeture pour manque de rentabilité[15]

NB : Pour répondre à la concurrence anglaise, la Transat aurait également ouvert une ligne Southampton – Brest – New York. Le 6 janvier 1871, le Pereire l'inaugure. Mais 2 ans plus tard, l'escale de Brest est remplacée par Plymouth, dont les accès sont jugés moins dangereux [16].


Brest, tête de ligne … pour une unique traversée

En 1866, le conseil municipal de Brest, sous l'impulsion du maire, Joseph Marie De Kerros, et la chambre de commerce décident de devenir actionnaire de la « Société des Affréteurs du Great Eastern ». Ils prennent la moitié des parts et obtiennent en échange que Brest soit le port d'attache de ce navire [17]. Objectif, la création d'une ligne Brest – New York. L'année suivante doit en effet se tenir à Paris l'Exposition Universelle. C'est l'occasion de proposer aux visiteurs américains une ligne rapide entre New York et Paris, via Brest.

Affiche pour la ligne transatlantique Brest New York en 1867.jpg

Le SS_Great_Eastern Wikipedia-logo-v2.svg, 211 mètres de long, est le plus gros navire de l'époque (et le restera jusqu'en 1901). Précédemment utilisé pour mouiller des câbles sous-marins, il est coûteusement reconverti en paquebot à Liverpool. De nouvelles chaudières, 3000 lits, plusieurs salles à manger sont aménagés. Le 26 mars 1867 (mauvais signe, le bateau est déjà en retard par rapport aux billets vendus !), ce « géant des mers » entreprend sa traversée inaugurale de Liverpool vers New York.

Puis retour sur Brest où il mouille en rade le 29 avril 1867.

Contrairement au texte de l'affiche ci dessus, il n'en repartira pas pour New York !

C'est en effet un fiasco financier (et la faillite de la Société). Alors qu'il peut accueillir 4000 passagers, il n'en débarque que 193. Peu satisfaits de leur voyage : le bateau n'est pas confortable (il roule trop) et pas spécialement rapide (bien qu'un des premiers à être équipé d'une hélice, c'est encore un bateau à roue).

Parmi ces rares passagers, un certain Jules Verne, invité de l’affréteur. Impressionné par la taille du Great Eastern, il en fera le héros de son livre « La Ville Flottante » (1871).

Ce sera l'unique traversée New York - Brest, et le navire reprendra son activité de pose de câbles transocéaniques.


Sources
  1. Les paquebots du Havre à New York (1814-1848) : article de Pierre Derolin dans les Annuaires de l'Ecole Pratique des hautes études – Année 1978 – Page 1295
  2. Revue d'histoire des chemins de fer (2008 / 38)- Article de Christophe Le Bollan -L'arrivée à Brest
  3. Site web Région Bretagne
  4. Les Cahiers de l'Iroise no 223
  5. Le livre d'Alain Boulaire « Ports de Brest » page 40
  6. Le rapport du Comité Brest-Transatlantique est accessible 6|en ligne
  7. Ce rapport est également accessible ligne
  8. Ouest France le 24/05/2014
  9. Source à indiquer
  10. Source à indiquer
  11. Histoire de la Flotte – La CGT – par Ludovic Trihan (Glénat)
  12. Site web herodote.net
  13. Source à retrouver
  14. Les tarifs détaillés figurent dans le livre d'Alain Boulaire « Ports de Brest » page 40
  15. Brest en 100 dates – Edition Alan Sutton – page 60
  16. Histoire de la Flotte – La CGT – par Ludovic Trihan (Glénat)
  17. Livre de Y Le Gallo
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