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Borda

Le Borda est le surnom qui était donné aux bateaux qui ont longtemps servi dans le port de Brest de navire-école pour l'École d'application de la marine, l'ancêtre de l'École navale, pour les élèves-officiers de marine.

Historique des bateaux ayant servi de Borda

La maquette du Valmy (ou Borda III), construit vers 1840
L'Intrépide (ou Borda IV), navire de l'École d'application de la Marine entre 1863 et 1890

Le premier vaisseau sur lequel fut installé l'École d'application de la Marine, crée en 1830, ancêtre de l'École navale, se nommait l' Arion ; il fut remplacé en 1840 par le Commerce-de-Paris, vieux trois-ponts en bois qui datait de 1808. Le Commerce-de-Paris ayant un nom inapproprié pour une École navale, on le rebaptisa le Borda (du nom de Jean-Charles de Borda[1], célèbre savant et marin français du XVIIIème siècle), du nom d'un vaillant et savant officier de marine. En 1863, on transporta l'École sur le Valmy (ou Borda III), puis en 1890 sur L'Intrépide[2] (ou Borda IV)[3], et vers 1900 sur le Duguay-Trouin (ou Borda V)[4] (voilier navire-hôpital dénommé antérieurement "Saïgon"[5], servant d'École d'application à partir de 1900), mais tous ces navires continuèrent à être surnommés Borda. En 1912, c'est le croiseur cuirassé Jeanne-d'Arc (1899)[6], lancé en fait en 1902, qui devient navire-école et le reste jusqu'en 1928 (avec une interruption pendant la première guerre mondiale).

Le vieux Borda, après sa désaffection, continua à croupir pendant plusieurs décennies à l'abri de la digue du port de guerre, mais, bien qu'abrité des lames, il tanguait parfois en gémissant sur ses ais,ne tenait plus que par la force de l'habitude au point que « les rats même commençaient à le quitter » et il était grand temps de l'abandonner (ce qui fut fait en 1913), même s'il avait encore bel air vu de loin avec les raies noires et blanches de sa coque, ses sabords et ses trois mâts dont le plus haut atteignait 80 mètres[7].

La cérémonie d'entrée au Borda

L'arrivée du Duguay-Trouin (ou Borda V) à Brest en 1901

Les nouveaux étaient embarqués au ponton du pont Gueydon, un jour avant les anciens. Entassés comme des moutons dans une canonnière, ils étaient pleins d'entrain et de joie en lançant un adieu à leurs familles. À peine arrivés, on les classait, on les numérotait, on leur enlevait leurs vêtements pour leur donner la blouse blanche et le pantalon de toile des conscrits et on leur rasait la tête.

Le surlendemain, les parents étaient admis sur le borda à la messe de rentrée qui était célébrée dans l'entrepont servant d'étude. Des drapeaux entouraient l'autel, un seul fauteuil était réservé au pacha, le capitaine de vaisseau commandant l'École. Les parents prenaient place sur les bancs, et alors entaient les élèves, les anciens les premiers, se rangeant sur les côtés, et ensuite les nouveaux faisant triste mine dans leur nouveau costume sous les quolibets des anciens criant : « Caillou ! caillou ! » pour saluer les têtes rasées. lors commençait la messe, tandis que la musique des équipages de la flotte, restée sur le pont, jouait des morceaux religieux.

Déjà la veille les anciens avaient procédé à la reconnaissance des nouveaux ; chacun avait choisi son fistot et ceux-ci arrivaient pour dîner à la salle à manger où la soupe était servie. « Qu'est-ce que cela ? », disaient les anciens aux nouveaux, « vous croyez que vous allez dîner ? Apprenez qu'un officier de marine doit savoir se passer de dîner ». Et aussitôt, ils jetaient par les sabords toute la vaisselle et les bouteilles. Ce qu'on en a jeté de ces assiettes pendant tant d'années ! On prétendait même que leur amoncellement sur le fond de la rade servait de pilotis au vieux Borda et qu'il ne tenait plus que par là. Cette tradition était respectée. On se contentait de faire payer la casse aux parents, et c'était fort peu de choses. Mais les anciens sortaient alors de leurs poches des gâteaux et du Madère pour les pauvres nouveaux : c'était leur adoption[8].

Les autres traditions

Un élève-officier de l'École d'application de la Marine vers 1836 (Ernest Chassériau)

Une autre cérémonie traditionnelle à bord du Borda était la "remise du sabre" au fistot par son ancien, pour le premier jour de sortie ; le fistot se mettait à genou et baisait la lame du sabre comme s'il était armé chevalier par un preux.

Au printemps, quand avait lieu la première sortie en canot, avait lieu une autre consécration, celle du baptême, que les anciens administraient aux nouveaux à grands renforts de seaux d'eau[9].

L'argot du Borda

Le Borda avait son argot, comme toute "Grande École" qui se respecte. Les éléphants, ce sont les civils, alias les pékins. Le bordache, c'est l'élève ; le clafustard, c'est le mécanicien ; les bichons, ce sont les godillots ; les molosses, ce sont les sous-officiers surveillants ; la carlingue, c'est l'architecture navale qu'il faut ramorder. Enfin, il y a les "chansons du bord", qui ne sont pas toutes transcriptibles en raison de leur crudité, et les "farces du bord", dont la plus connue consiste passer sous le hamac d'un camarade et à le faire chavirer en faisant le gros dos[10].

L'apprentissage du métier de marin

Tout cela n'empêche pas les futurs officiers de marine de travailler ferme ; dès les premiers jours, les anciens accompagnent les nouveaux dans l'ascension des haubans, et leur font faire le rétablissement pour entrer dans la hune. C'est la première étape. Puis vient l'ascension de la seconde hune, et peu à peu, chacun s'habitue à ne pas avoir le vertige, à courir sur la corde tendue au-dessous de chaque vergue, à lâcher la voile et à la remonter par les ris, tout cela aux commandements du sifflet. Bien que le métier de gabier fut devenu inutile avec les navires de guerre modernes, on l'enseignait toujours aux élèves-officiers, pour qu'ils soient aptes à ramener une prise en cas de guerre, et à la ramener avec ses voiles, et parce que cela faisait partie de la tradition.

Les deux années d'école étaient bien remplies par tout ce que devait apprendre un officier de marine : la rame, la voile, la machine, les exercices d'infanterie, la manœuvre du canon, les signaux de timonerie avec les drapeaux, le service du bord, les mathématiques supérieures, la géographie, l'hydrographie, l'anglais, et je ne sais combien de choses.

Puis venait la troisième année où les anciens, devenus aspirants, reçoivent les aiguillettes, qu'ils ne porteront plus que s'ils deviennent officiers d'ordonnance, et ils voyagent comme dans un rêve, pour le plaisir autant que pour leur instruction. Ils visitaient les principaux ports de la Méditerranée, les fjords de Norvège, les deux Amériques, passent quelquefois le carnaval à La Nouvelle-Orléans et reviennent pour prendre place sur un vaisseau comme aspirant de première classe pendant deux ans avant de passer enseigne de vaisseau[11].

L'École navale à terre

L'inauguration de l'École navale par le président de la République Albert Lebrun le 30 mai 1936

Dès le début du XXème siècle, un projet d'installation à terre de l'École navale a failli aboutir, l'emplacement choisi étant à la Pointe, dans le quartier de Recouvrance à Brest, mais il échoua faute de financement. Elle s'installa toutefois en 1915 dans des bâtiments existants à Laninon.

La première pierre de l'École navale est posée le 14 novembre 1929 par Georges Leygues, alors ministre de la Marine, et elle est inaugurée le 30 septembre 1935 à Saint-Pierre-Quilbignon, alors commune indépendante de Brest[12] par le président de la République Albert Lebrun[13]. La tradition d'un voyage autour du monde a été préservée, en particulier à bord des Jeanne d'Arc successifs : le Jeanne d'Arc (1899)[14], le Jeanne d'Arc (1930)[15], le Jeanne-d'Arc (porte-hélicoptères)[16], désarmé en 2010.

En 1945, les destructions importantes subies par l'École navale de Saint-Pierre-Quilbignon pendant la Seconde guerre mondiale ne permettaient pas d'accueillir rapidement les élèves officiers dans des conditions acceptables. Elle fut transférée dans des baraquements à la base d'hydravions de Lanvéoc, dans la baie de Poulmic, les bâtiments de la nouvelle École navale à cet endroit furent inaugurés en 1965 par le général De Gaulle[17].L'ancienne École navale de Saint-Pierre-Quilbignon abrite désormais le lycée naval de Brest ainsi que l'École des Mousses.

Notes et références

  1. http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Charles_de_Borda
  2. http://www.passionmilitaria.com/t28965-l-intrepide-devenu-le-borda-4-du-nom
  3. http://fr.wikipedia.org/wiki/L%27Intr%C3%A9pide_(Borda_IV)#Le_navire-.C3.A9cole_Borda_IV
  4. http://fr.wikipedia.org/wiki/Duguay-Trouin_(1900)
  5. http://www.navires-14-18.com/fichiers/D/DUGUAY_TROUIN_MN_V5.pdf
  6. http://fr.wikipedia.org/wiki/Jeanne_d%27Arc_(1899)
  7. Le Journal du dimanche, n°248 du 24 août 1913, consultable http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5677308w/f13.image.r=Recouvrance.langFR
  8. Le Journal du dimanche, n°248 du 24 août 1913, consultable http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5677308w/f13.image.r=Recouvrance.langFR
  9. Le Journal du dimanche, n°248 du 24 août 1913, consultable http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5677308w/f13.image.r=Recouvrance.langFR
  10. Le Journal du dimanche, n°248 du 24 août 1913, consultable http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5677308w/f13.image.r=Recouvrance.langFR
  11. Le Journal du dimanche, n°248 du 24 août 1913, consultable http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5677308w/f13.image.r=Recouvrance.langFR
  12. Journal "La Croix" n°16141 du 1er octobre 1935, consultable http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k414406n.r=Quilbignon.langFR
  13. Journal "Le Temps" n°27298 du 31 mai 1936, consultable http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k262864f/f6.image.r=Quilbignon.langFR
  14. http://fr.wikipedia.org/wiki/Jeanne_d%27Arc_(1899)
  15. http://fr.wikipedia.org/wiki/Jeanne_d%27Arc_(1930)
  16. http://fr.wikipedia.org/wiki/Jeanne_d%27Arc_(R97)
  17. http://www.lanveoc.com/index.php?option=com_content&view=article&id=62&Itemid=37
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