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7è Chapiteau d'hiver du Relecq-Kerhuon

Le Bal monté du TAV (intérieur)
Le Stalker du TAV
Le bar du bal monté

Septième édition du Chapiteau d’hiver du Relecq-Kerhuon du 11 mars au 2 avril 2017. L'organisation a été confiée, comme l'année dernière, par le Théâtre des Arts Vivants (TAV) qui, fort de la réussite de l'édition 2016, a décidé de rester une semaine de plus. Le bal monté a occupé le site de Camfrout dès le début du festival mais orienté différemment et qui, plus est, avec une reconfiguration de l'espace intérieur caractérisée, entre autres, par une surélévation de la scène. Le stalker (chapiteau) n'a été monté que le 15 mars ; le collectif Autre direction étant venu avec son propre chapiteau. A ses éléments déjà incontournables ont été ajoutées d'autres installations destinées à rendre l'espace encore plus accueillant, comme des toilettes sèches.

MERCREDI 15 MARS

15 h : Bim Bam Boum

Le DJ Julien Tiné et ses jeunes "clubbers"

Pour permettre aux enfants de se défouler par ce jour sans école, le DJ Julien Tiné leur a offert un après-midi festif. L'intérieur du bal monté a été dégagé et aménagé en piste de danse, permettant aux chers petits de s'agiter à leur aise sur des rythmes endiablés. Le DJ était déguisé en lapin, rappelant ainsi à quel public il s'adressait et amenant les témoins adultes à se demander comment il arrivait à mixer avec ses moufles. Ceux qui étaient trop fatigués pour gambiller ont pu se régaler de gâteau au chocolat au coulis de cerise. Les plus grands ont aussi eu droit à du spectacle en assistant à l'installation du stalker : comme le confirme Haroun, le plus dur est d'installer les mats et le toit.

JEUDI 16 MARS

20 h : La nuit de Valognes

De gauche à droite : Régis Le Pinic (Don juan), Monique Sithamma (Duchesse de Vaubricourt), Yvonne Plouzennec (Hortense de Hauteclaire), Joëlle Salaün (Comtesse de la Roche-Piquet) et Rozenn Petit (Mademoiselle de La Tringle)
Yunah Reisch (Sganarelle) et Régis Le Pinic
Régis Le Pinic et Julie Ramoné (Angélique)
Régis Le Pinic et Florent Alamelou (Pierre de Chiffreville)

Et si l'incapacité présumée de Don Juan à tomber amoureux de qui que ce soit dissimulait une incapacité à tomber amoureux d'une femme (ce qui n'est pas la même chose) ? Et si l'indignité du vil séducteur ne cachait pas une autre indignité, encore plus inavouable pour l'époque ? Telles sont les questions qui sous-tendent le texte d'Eric-Emmanuel Schmitt : ce "procès de Don Juan" intenté par quatre de ses anciennes victimes (une libertine, une nonne, une romancière et une vieille duchesse) devient peu à peu un autre procès, celui de toute une période de l'histoire européenne où hommes et femmes étouffaient littéralement sous le joug d'une religion qui forçait l'individu à aller contre sa nature. La thématique est cependant loin d'être obsolète et fait écho aux crispations contemporaines autour de la notion de "genre" : les personnages ont tous en commun de se révolter, plus ou moins violemment mais réellement, contre les comportements qu'ils seraient censés adopter en raison de leur sexe ou de leur âge - les questions liées au temps qui passe et au rôle que l'on endosse en public sont omniprésentes.

Mise en scène par la troupe du Théâtre Farrago, du Relecq-Kerhuon (si les compagnies venues d'horizons variés sont les bienvenues au chapiteau d'hiver, mettre en avant les artistes locaux fait partie intégrante de la philosophie de l'événement) et annoncée comme "joyeusement bordélique", la pièce a pourtant été jouée sobrement, dans un style que n'aurait pas renié Molière lui-même, l'audace formelle la plus extrême étant l'installation dans le public des anciennes "victimes" de Don Juan assistant au flash-back, organisé par Sganarelle, où le valet dit la vérité sur les rapports entre son maître et le commandeur. Certes, il y a un jeu de lumières fortement contrastées avec des couleurs très vives et des scènes où la violence des répliques le dispute à l'ampleur de la gestuelle mais rien de tout cela ne "choque" l'oeil du spectateur : tous ces éléments de mise en scène sont parfaitement en accord avec les événements auxquels il nous est donné d'assister et ne génèrent aucune surcharge. De ce point de vue, la représentation est une réussite : les meilleures astuces de mise en scène sont celles que le public ne perçoit pas, justement parce qu'elle servent le spectacle en contribuant à sa lisibilité et à sa mise en valeur.

Concernant les jeux d'acteur, la scène la plus "violente" est probablement celle où la religieuse renie sa foi, voyant désormais en Dieu un amant qui n'a rien à envier à Don Juan en matière d'indignité, une scène de révolte qui rappelle presque La Religieuse de Diderot. Les personnages sont fortement typés mais sont loin d'être caricaturaux : Régis Le Pinic campe un Don Juan qui se rend impénétrable justement parce qu'il craint d'être pénétré, le blanc de son costume et de son teint cessent rapidement d'être des marques de provocation d'un personnage extravagant pour devenir les signes de la mélancolie d'un homme blessé, le dandy laisse place à un Pierrot. La ravissante Julie Ramoné joue une Angélique qui est à des lieues d'être la créature insignifiante que dépeignent les autres femmes et se révèle, au contraire, autant éprise de conquête que le vil séducteur. Yunah Reisch, enfin, fait sortir Sganarelle de son statut figé de conscience de son maître et met en valeur la complicité qui le lie à Don Juan : le valet n'est plus le candide un peu naïf dépeint par Molière, si tant est qu'on ait jamais pu parler de naïveté concernant ce personnage qui revendiquait jadis savoir son Don Juan "sur le bout du doigt". En fait, Sganarelle ne parvient plus à cacher son attrait pour les audaces de vil séducteur de son maître, de telle sorte qu'il en vient à être déçu de constater, en perçant à jour l'âme de Don Juan, que ce dernier n'est pas à la hauteur de son personnage qu'il s'est d'ailleurs lassé de jouer mais auquel le ramène la comtesse de la Roche-Piquet, laquelle l'emmène ainsi aux Enfers à la place du commandeur, ce qui donne tout son sens à son costume écarlate comme le diable...

Distribution

  • Régis Le Pinic : Don Juan
  • Monique Stihamma : La Duchesse de Vaubricourt
  • Joëlle Salaün : La Comtesse de la Roche-Piquet
  • Yvonne Plouzennec : Hortense de Hauteclaire (la religieuse)
  • Rozenn Petit : Mademoiselle de La Tringle
  • Yunah Reisch : Sganarelle
  • Julie Ramoné : Angélique de Chiffreville / Marion
  • Florent Alamelou : Pierre de Chiffreville

Fiche technique

  • Mise en scène : Steeve Brudley
  • Régie : Christophe Bachelier et Jules Tanguy
  • Costumes : Yasmina Schickler
  • Maquillages : Josiane Quillivic et Prune Bodenez
  • Conseils artistiques : Yano Benay
  • Maître d'armes : M. Lemoine
  • Conception affiche : Jérémy Breut
  • Conception logo : Gabrielo Bonnano

VENDREDI 17 MARS

Deux slameurs en herbe
Thierry Nezet

19 h : Soirée Slam

Cette scène ouverte animée par le rappeur et slameur brestois SinnKaya a vu défiler aussi bien de vieux routiers de la scène slam que des débutants qui déclamaient en public pour la première fois. Du côté des habitués, outre SinnKaya lui-même, on a ainsi pu revoir Gaëtan Kerdraon, qui s'était déjà produit au Chapiteau d'hiver l'année dernière et qui s'est fendu pour son retour, entre autres, d'un joli texte anti-Front National. Autre slameur confirmé, Thierry Nezet composait dans un registre plus proche du monologue théâtral du fait de l'ampleur de ses textes qui battaient le record de longueur de la soirée. Marie, du TAV, est elle-même montée sur scène à deux reprises, se donnant ainsi l'occasion de déclamer sans fond musical, ce qu'elle n'avait encore jamais fait selon ses dires ; on a même eu droit à un nouveau passage de Michel Lidou qui nous a fait sortir du pré carré du slam pour entrer de plain-pied dans celui du conte, ce qu reste de la littérature orale. Du côté des débutants, les élèves de 5è du Relecq, que SinnKaya suivait depuis une semaine, ont enthousiasmé le public avec leurs textes brocardant la société de consommation et la civilisation de l'image, opposant le plus cinglant des démentis à ceux qui dépeignent la jeunesse comme apathique et incapable de s'intéresser au monde autrement que par des jeux en ligne. La prestation de Blequin, par ailleurs présent en tant que caricaturiste sur la quasi-totalité des événements, a elle aussi été très appréciée.

SAMEDI 18 MARS

19 h : Soirée d'ouverture du festival Les Renc'Arts

Deejay Taj

Fait rare, qui rapprochait exceptionnellement le Chapiteau d'hiver de la configuration "traditionnelle" des festivals de musique, ce soir-là, le stalker et le bal monté étaient simultanément ouverts, le premier accueillant la soirée proprement dite avec les quatre concerts de musiques urbaine au programme (Randle P., Oakward, El Maout, Deejay Taj) et le second offrant, avec son bar, l'espace où le public pouvait faire une pause entre deux morceaux. Bien entendu, pendant la majeure partie de la soirée, le public fut plus nombreux sous le stalker que sous le bal monté, ce qui n'alla pas sans agacer légèrement Salomé qui, derrière le bar, s'ennuyait un peu en attendant les clients. SinnKaya, qui était revenu en tant que chanteur du groupe Randle P., fut gagné lui aussi par l'impatience étant donné que son groupe qui était initialement programmé en premier,a finalement dû attendre la fin de la prestation de Deejay Taj pour se produire. Tout cela n'a en rien gâché le plaisir de l'assistance qui, par ailleurs, frappait l'observateur par son caractère hétéroclite : on y voyait des gens de tous les âges voire de tous les milieux, signe évident que les cultures hip hop mises à l'honneur ce soir-là sont sorties de leur ghetto culturel. Certains crieront à la récupération, mais le fait que ces musiques ne soient plus cataloguées "de jeunes" ou "de sauvages" indique qu'elles sont reconnue comme moyens d'expression à part entière, ce qui est le signe de leur réussite.

DIMANCHE 19 MARS

Prêts à aller sur la piste !

16 h : Soul Train Line

A l'occasion de ce "spectacle à danser", le public, en entrant dans le bal monté, était invité à troquer ses vêtements de ville contre l'une des nombreuses tenues colorées (toutes les tailles était disponibles) proposées par la costumerie mise en place par Des habits et vous ; un changement de costume indispensable pour réussir pleinement cette plongée dans l'ambiance des années 1970 proposée par la compagnie Engrenage. Deux danseurs et un Dj étaient présents pour transmettre les mouvements chorégraphiques emblématiques de l'époque et recréer l'ambiance de la fameuse émission Soul Train qui fit les beaux jours de la télévision de Chicago. Ainsi la piste du bal monté, pleine comme un oeuf, devint-elle, l'espace d'un après-midi, le théâtre d'un des hommages les plus vivants jamais rendus à la musique noire américaine depuis le film Blues Brothers.

VENDREDI 24 MARS

La fanfare des Gars du Reun sur la scène du bal monté

19 h : Soirée Mic Mac

Tout comme l'année précédente, la scène ouverte Mic Mac a fait une infidélité au Comix pour s'inviter au Chapiteau d'hiver ; la soirée a commencé en fanfare, au sens propre comme au sens figuré, avec les Gars du Reun de Guipavas. La participation d'une fanfare à une scène ouverte n'est pas monnaie courante mais a été rendu possible par l'espace procuré par le bal monté, plus grand que la petite salle bondée du Comix dont les deux jeunes ordonnatrices des soirées Mic Mac son habituées. Il faut croire que ce commencement original a porté chance à la soirée car, après un léger flottement dans la première demi-heure, la salle et la scène n'ont plus désempli !

SAMEDI 25 MARS

13 h : Salon kerhorre de la micro-édition

Blequin, Elena Tikhomirova et Jean-Yves Le Fourn

Encore un revenant de l'année précédente, fidèle au poste. Pour la deuxième année consécutive, sérigraphes, éditeurs et graphistes se sont donnés rendez-vous pour présenter au public les pratiques éditoriales les moins connues qui sont autant d'alternatives aux grosses machines commerciales. Dans le cadre de cette première journée de salon furent organisés un atelier de création de badges et une séance de "Tac au Tac" avec les artistes Jean-Yves Le Fourn, Elena Tikhomirova et Blequin.

19 h 30 : La princesse de Clèves

Benoît Schwartz

L'expression "dîner-spectacle" prenaient enfin tout son sens dans cette mise en scène où les plaisirs de la table et ceux de l'esprit étaient étroitement mêlés au lieu d'être simplement juxtaposés. Ce soir-là, le fond de l'air était pour le moins frais, ce qui donnait une raison supplémentaire au public venu nombreux (près de 80 personnes avaient réservé pour seulement 50 places disponibles !) pour être impatient de se réfugier sous le Stalker. Néanmoins, une fois la porte ouverte, il a fallu continuer à patienter un minimum : loin de laisser s'engouffrer le public en vrac comme un torrent dans une vallée, Benoît Schwartz, le concepteur et interprète du spectacle, a pris soin de placer lui-même les spectateurs autour de la table baroque, qui avait été installée sous le chapiteau, en fonction des besoins de la mise en scène. En effet, à peine le comédien, installé en bout de table, commença-t-il le récit, devenu pour ainsi dire légendaire, de cette magnifique princesse qui fit mourir malgré elle son mari en lui avouant une passion illégitime, que tout le public fut interpellé en tant que partie prenante de la cour d'Henri II et Catherine de Médicis ! Ainsi certaines personnes devinrent-elles, le temps d'une soirée, la princesse de Clèves, son époux, le duc de Nemour, le vidame de Chartres, le roi lui-même ou son épouse. Le récit, soutenu par un jeu de lumières astucieux qui causa une vive impression, était de temps en temps interrompu le temps d'un court exposé didactique sur les moeurs de l'époque où la conception de l'hygiène n'était pas tout à fait la même que celle d'aujourd'hui ! Le public a ainsi pu découvrir une version inattendue de l'origine d'expressions telles que "joindre les deux bouts", "sucrer les fraises" ou "en deux coups de cuillère à pot". Quelle était la part du vrai et la part d'invention dans ces leçons de linguistique du professeur Schwartz ? Qu'importe : le roman de Madame de la Fayette dont s'inspirait le spectacle se situe de toute façon sur la frontière entre le mythe et l'histoire.

Après ce récit, au cours duquel le public avait déjà eu un apéritif original avec un vin blanc aromatisé (les appréciations sur cette boisson furent assez partagées), un repas fut servi avec des mets conçus dans l'esprit de la cuisine de cour au XVIIè siècle : pas question, bien sûr, de pousser la reconstitution historique au point de servir des animaux avec leurs poils ou leurs plumes comme ça a pu se faire au temps d'Henri II ! Il n'empêche que la soupe aux pois, le jambon cuit et le gâteau et la cannelle ont été fort appréciés et n'auraient pas fait honte à la table de sa majesté.

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