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Remorqueur Kerhuon

Remorqueur Kerhuon

Vie et description

Introduction

Monsieur le Maire, Mesdames et Messieurs du conseil municipal actuel, Mesdames et Messieurs du conseil municipal de la mandature 1977 - 1983 et son maire, Mr Liziar : au nom de tous les retraités du remorquage « Port et Mer » de l'ex U.R.O. (Union des Remorqueurs de l'Océan) Agence de Brest. Je vous remercie de l'accueil chaleureux fait à notre idée de vous confier, pour que vous « l'amarriez » à l'endroit de votre choix dans cette maison commune, la photographie du remorqueur « Kerhuon » qui fût en son temps l'un des plus puissants remorqueurs côtiers de France, assurant les manœuvres et la sécurité des plus gros navires du monde ! De la Pointe Saint-Mathieu au port de Brest, ce joyau de technologie appartenait donc à l'U.R.O dont je vais vous conter « brièvement » l'histoire et plus particulièrement son aventure brestoise : celle de ses navires et de ses marins dont la vie à bord se déroulait conformément au contrat signé avec cette compagnie spécialisée dans le remorquage, le renflouement, l'assistance et le sauvetage en mer.

Remise de la photo du remorqueur Kerhuon au maire

De « l'Union Maritime Française » à « l'Union des Remorqueurs de l'Océan »

Cette société fut fondée en 1922 sous le nom de « l'Union Maritime Française » par Henri Cancardel, ancien directeur de la Compagnie Générale Transatlantique, au Havre. Plus tard, il confia la direction à son fils aîné Maurice qui développa son activité en la mariant avec d'autres acteurs du remorquage de l'Ouest pour devenir en 1939 une compagnie nationale et internationale, assurant la présence de sa quarantaine de remorqueurs, sur toute la façade atlantique : de Brest à Port Gentil au Gabon, d'où son nom de : Union des Remorqueurs de l'Océan.

De « l'Iroise » au « Roscanvel »

L'aventure brestoise de Mr Cancardel commence avec « L'Iroise » brise-glace transformé en remorqueur peu manoeuvrant et pas très puissant, il fît cependant sous les ordres du Commandant Louis Malbert plusieurs sauvetages remarquables. Peu avant la seconde guerre, « L'Iroise » est remplacé par le « Roscanvel » remorqueur mixte port et mer (déjà !) plus puissant et plus moderne. Il est désarmé à l'arrivée des Allemands à Brest. Apparemment ce manque de collaboration a déplu, car avant son départ en 1944, l'occupant le coule ! « Le Roscanvel » est renfloué en 1946 et rejoint le port de La Pallice.

La compagnie des « Vapeurs Brestois »

A cette époque, le trafic du port de Brest est faible, et la compagnie des « Vapeurs Brestois », titulaire de la ligne à passagers « Brest - Le Fret- Quelern - Brest » peut aisément assurer aussi les manœuvres portuaires des quelques cargos, accostant aux quelques mètres de quai sauvés des bombardements. Le Camaret yacht transformé en navire à passagers et en remorqueur suffit à ce travail, avec l'appoint si nécessaire du « Morgat » et du bateau pilote « La Parquette » avec l'inconvénient majeur : avant de passer la remorque il faut démonter l'échelle de la passerelle, et le tuyau de la cuisinière ! En 1964, la compagnie des vapeurs brestois fût rachetée par l'U.R.O et le « Camaret » acheva son existence chez L'Hermite qui est un ferrailleur.

1958 : l'U.R.O revient à Brest

En mer, l'assistance et le sauvetage étaient assurés par les Hollandais ; les Anglais avec le fameux « Turmoil » et la compagnie des Abeilles avec successivement les Abeilles 25 et 26. En 1956, les Abeilles quittent Brest faute d'équilibrer leur budget. En 1958, l'U.R.O reprend la place qu'elle occupait avant guerre avec un remorqueur mixte, pratiquement neuf, mais mal équipé : pas de treuil de remorque ni de cabestan à ses débuts : dur travail pour l'équipage de ce « Pontaillac » venu des eaux douces de Bordeaux. Cependant avec ses 15 tonnes de traction, il fera de nombreuses assistances grâce au savoir-faire de ses marins bretons ! « Filer en quelques minutes 200 - 300 voire 400 mètres de fil d'acier lovés sur le pont en grandes boucles avec des bosses cassantes à chaque pli est un exercice, certes spectaculaire mais ô combien dangereux. » Et pourtant ils sont presque tous là avec nous aujourd'hui. Entre chaque sortie en mer le « Pontaillac » avec les remorqueurs de la DP, quand c'est nécessaire, assure les mouvements du port. Le trafic progresse régulièrement, guerre d'Algérie oblige et surtout les passages en cale sèche de pétroliers augmentent. Merci la forme N°1 remise en service vers 1955. De 1958 à 1970 plusieurs remorqueurs se succèdent à Brest, leur taille et leur puissance variant avec les hauts et les bas du trafic portuaire. Brest, port d'éclatement charbonnier n'a duré que le temps d'une illusion : ce trafic rentable a vite été récupéré par le Havre.

Des bidons toujours plus gros

Dès 1968, date de mise en service de la forme N°2, la réparation navale devient très active : la puissance et la maniabilité des remorqueurs doivent évoluer en fonction du tonnage de ces « bidons » toujours plus gros : 65 000, 100 000, 200 000, 250 000 tonnes. La forme N° 2 est trop petite, vive la forme N°3 capable de recevoir les géants des mers « 500 000 tonnes, 410 m de long, 68 m de large, 29 m de tirant d'eau !» telles sont les caractéristiques des « Batillus », « Bellamya », « Pierre Guillaumat », « Prairial ». Un peu les enfants de l'U.R.O puisqu'à chacune de leur naissance aux chantiers de Saint Nazaire, nous étions là avec plusieurs autres remorqueurs pour jouer les sages-femmes.

Le « Roscanvel » et le « Kerhuon »

Brest devient premier port de France pour la réparation navale et doit encore augmenter la puissance de ses remorqueurs, l'U.R.O fait face en faisant construire aux A.F.O. de Grand Quevilly le « Roscanvel » 3 500 CV et 48 tonnes de traction et en achetant sur le marché des occasions en Hollande une coque inachevée, moteur de 3 000 CV encore sous hangar, dans un petit chantier au bord d'un canal à une centaine de kilomètres de Rotterdam. Les finitions sont suivies par un chef mécanicien habitant Le Relecq-Kerhuon, les essais et l'armement sont menés à bien par un équipage de Brest dont le capitaine en est le chef d'agence habitant lui aussi au Relecq-Kerhuon, comme le maître d'équipage et le maître mécanicien. Il fallait donner un nom au remorqueur, tout naturellement, il s'est appelé le « Kerhuon » avec l'accord unanime du conseil municipal d'alors (1980) ; Relecq-Kerhuon étant un nom trop long pour la clarté des messages radio. Durant 4 ans, ces deux remorqueurs ont rendu d'inestimables services au port de Brest. Mais voici le deuxième choc pétrolier avec mise à la chaîne dans les fjords de Norvège de la moitié des géants des mers. Suit très rapidement la liquidation douloureuse des A.F.O. Les deux supers remorqueurs ne sont plus indispensables pour Brest et beaucoup trop onéreux pour une agence qui avait flirté avec les plus grands. Le 8 juin 1984, le « Roscanvel » est affecté à Saint-Nazaire où la raffinerie de Donges fonctionne à plein... Ce qui nous fait regretter l'abandon du projet de Saint-Divy. Quant au « Kerhuon », quelques mois plus tard, il fait route inverse du « Pontaillac » pour rejoindre les eaux douces mais tumultueuses de la Gironde où là aussi les raffineries continuent à fonctionner. Il donnera entière satisfaction aux usagers du port grâce à sa traction et à sa grande maniabilité dans les courants. En 1988, c'est la fin du trafic pétrolier avec la fermeture des raffineries, le «Kerhuon » est à son tour affecté à Saint-Nazaire.

La disparition de l'U.R.O

Avant cela, le 1er avril 1987 vît la fin de la saga U.R.O. le groupe financier « Elysées Investissements » rachète « les Abeilles » et l'U.R.O mais ne conserve que le nom Abeilles. Merci l'Amoco Cadiz et ses retombées politiques. Dès lors, nos chers remorqueurs vont de ruches en ruches, de fonds de placement en pseudo armateurs. En 2008, le tout remorquage portuaire de Dunkerque à Marseille tombe dans l'escarcelle de la compagnie espagnole Beluda, véritable armateur paraît-il? Le bel idéal européen se limiterait-il à la libre circulation des biens ? Et les hommes alors ?

Des hommes de courage, de compétence, de cœur

Marins et familles

Les hommes ? Oui, les marins de l'U.R.O - Brest étaient vraiment des hommes de courage, de compétence et de cœur. Pour équilibrer le budget de l'agence, le remorquage portuaire ne suffisait pas ! D'où l'obligation, mais aussi la passion d'accomplir des missions en mer. Dans son numéro de novembre 1998, le magazine « Sillage » sous l'intitulé « les dignes héritiers du commandant Malbert » parle de missions périlleuses, de missions prestigieuses mais bien trop nombreuses pour les évoquer toutes. Sachez seulement qu'en trente ans, ces remorqueurs, bâtards mais souvent bien conçus ont mené à bien plus de 150 assistances ou sauvetages, et une bonne centaine de remorquages hauturiers ou côtiers, et tout cela en parfaite discrétion : parfois quelques lignes dans la presse locale, ni interviews fracassants, ni roulements d'épaule sur les plateaux télé. Ces hommes avaient du coeur, des femmes et des enfants. Pour eux, ils organisaient des arbres de Noël etc. La famille U.R.O. n'était pas un vain mot. Que d'anecdotes pourrions-nous évoquer : mariages, premières communions interrompus par des départs inopinés en assistance ! Pardon mesdames ! Mais vous y trouviez voter compte au retour et une petite prime en supplément.

De la création de la « Caisse d'Entraide », à la « Mutuelle Familiale »

Mais la plus belle réalisation pour nos familles, c'est surtout la création de la caisse d'entraide, sorte de mutuelle où les cotisations étaient modulées selon les salaires, pour des prestations égales pour tous avec des aides ponctuelles pour négocier des passes officielles, mais avec une vingtaine de cotisants, un tel système montre ses limites. C'est pourquoi après un passage de quelques années à la mutuelle familiale des travailleurs de la région parisienne avec la participation des dockers de Concarneau, des marins pêcheurs du quartier du Guilvinec, des papillons blancs du Finistère etc. nous avons fondé la Mutuelle Familiale du Finistère. En 1976, le président, le trésorier et le trésorier adjoint étaient des marins de l'U.R.O. Cette mutuelle a grandi regroupant 8 000 adhérents pour 12 000 personnes couvertes. La collectivité 34 s'appelle désormais Mutuelle Familiale des Actifs et Retraités du Port de Brest où l'on retrouve les ex-U.R.O. le lamanage, le balisage etc. En 2008, la Mutuelle Familiale d'Armorique change de nom en retournant à Paris rejoindre les 155 000 adhérents de la Mutuelle Familiale (marges de solvabilité énormes imposées par l'Europe nous imposent ce repli). Et grâce à notre énergie retrouvée la Mutuelle Familiale ouvre une agence à Brest, 7 rue Victor Hugo, en appui aux Mutuelles de Bretagne dont nous devenons le principal partenaire.

Fierté des marins et don à la Mairie du Relecq-Kerhuon du « Portrait » du remorqueur Kerhuon »

Telle est l'aventure de l'U.R.O de son agence de Brest et de ses marins, retraités mais toujours regroupés en famille au sein de leur association unique dans les ports français. Nous sommes ici aujourd'hui pour vous confier la photographie, non, le portrait de ce qui fût l'un de nos plus beaux outils de travail et de fierté. Merci d'en prendre soin !

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