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De Wiki-Brest

Prison du Bouguen

Lorsqu'à Brest une personne étrangère au quartier évoquait Le Bouguen, la première image qui venait à l'esprit, c'était la prison. Evidemment, en matière d'image de marque, il y a mieux. Quant à la population du quartier elle n'en était pas plus affectée que s'il s'était agit d'une usine ou d'un bâtiment administratif quelconque. Pour nous, les jeunes, il en émanait comme une atmosphère de mystère mêlée de crainte. Le haut mur d'enceinte en maçonnerie et la porte monumentale qui donnaient sur la route du Bouguen y étaient sûrement pour quelque chose.

Au-delà du mur, des jardins étaient mis à la disposition des gardiens, dont quelques-uns logeaient à l'intérieur de la prison. L'ensemble, prison et jardins, occupait l'emplacement de l'actuel stade municipal. La prison fut construite de 1857 à 1859, en remplacement de l'ancienne geôle qui se trouvait au Château. C'était la prison civile, la prison de Pontaniou étant la prison militaire.

Il en fut ainsi jusqu'à l'été 1940, moment où l'occupant s'en appropria une partie pour y incarcérer des détenus, qui eux n'étaient pas des droits communs, mais des patriotes ayant dès le début de l'occupation, pris le parti de résister. Il y a tout lieu de penser que, pour certains d'entre eux, leur combat s'acheva à proximité, dans les douves, juste derrière la porte Castelnau, contre une butte de terre, où étaient dressés les poteaux d'exécution. Nous sommes quelques-uns à avoir vu ces poteaux ensanglantés, déposés à proximité des trous où ils avaient été dressés. Il y a des images qui ne s'effacent jamais. J'imagine souvent ces condamnés, franchissant la porte Castelnau pour se rendre au supplice. Ils la voyaient, peut-être, commme la porte de l'Au-Delà. Décidément, pour moi, la porte Castelnau ne sera jamais un monument comme les autres. Le temps est peut-être venu de la rebaptiser autrement ?


La porte Castelnau (poterne) vue de l'intérieur des douves. Après avoir franchi la voûte, les condamnés descendaient par la rampe de gauche. Les poteaux d'exécution étaient dressés face à la butte de terre dont on distingue le début derrière la rampe.


Dans la nuit du premier au deux juillet 1941, une bombe anglaise de forte puissance détruisit la prison, provoquant la mort de sept personnes, dont quatre allemands. Certains prisonniers réussirent à s'enfuir. Un témoin se souvient, alors qu'il se trouvait dans l'abri décrit plus haut, en avoir vus passer pour franchir les fortifications. Je me souviens parfaitement des patrouilles allemandes qui sillonnaient le quartier à la recherche des fugitifs.





La prison du Bouguen après le bombardement du premier juillet 1941.



Les bombardements anglais débutèrent presque immédiatement après l'arrivée de l'occupant. Ils étaient le plus souvent nocturnes et ciblés sur un objectif précis, avec souvent un résultat décevant. La prison comme objectif ? c'était peu vraisemblable. Il me revint en mémoire que quelques jours avant le bombardement, me promenant sur les hauteurs du Bouguen donnant une vue plongeante sur la Penfeld, j'aperçus, sous leurs filets de camouflage, accostés au quai rive gauche, trois sous-marins à couples. A vol d'oiseau la prison se trouvait à 2 ou 300 mètres. Etait-ce la véritable cible ? Sans doute, mais ceci n'est qu'une hypothèse.

La prison ayant été détruite, les détenus furent transférés dans d'autres établissements pénitentiaires, probablement à la prison militaire de Pontaniou en ce qui concerne les politiques. Les exécutions n'en continuèrent pas moins puisqu'on sait qu'en 1944, 23 résistants furent fusillés dans les douves. Leurs dépouilles ne furent découvertes que longtemps après, lors de la construction de la faculté. Incarcérés à Pontaniou ils empruntèrent vraisemblablement la route du Bouguen, et franchirent eux aussi la porte Castelnau.

Une question reste tout de même en suspens : qui étaient les fusillés de 1940 à 1944 ? Espérons qu'un jour peut-être, un historien y répondra et que leurs noms iront rejoindre ceux gravés sur la plaque commémorative inaugurée récemment près de l'IUT.

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