Interview-Sillage : Antonio Fuentes, president du cercle franco espagnol
Cet article est extrait du Magazine Sillage N°134 - fév.-mars 2009 |
Énergie, amitié et culture en partage
En 1961, à 14 ans, Antonio Fuentes Sarabia arrivait en France. Après un bref passage par l'école et l'apprentissage, il devenait tapissier d'ameublement, profession qu'il exerce toujours. Depuis près d'un demi-siècle, il n'est pas un jour qu'il n'ait pensé à son pays natal. Mieux, il préside le cercle franco-espagnol, dont le local est un petit coin d'Espagne aux Quatre-Moulins. L'occasion de parler du pays, écouter et faire de la musique, retrouver des amis, partager des repas. Autant de moments aussi précieux qu'indispensables.
Dans quelles circonstances êtes-vous arrivé à Brest ?
Parti de Santander, je suis venu rejoindre mon père et mon grand père qui y travaillaient déjà. Six mois après ma mère et ma sœur nous ont rejoints.
Quelles ont été vos premières impressions ?
Au départ ça n'a pas été facile. J'avais 14 ans, j'étais un peu désemparé. Je ne parlais pas un mot de français.
Et les gens, comment étaient-ils avec vous ?
Bien que déraciné, j'ai toujours été bien accueilli partout et toujours.
Quel a été votre parcours ?
Après un an et demi à l'école, je suis devenu apprenti en tant que tapissier d'ameublement. Après dix ans comme ouvrier, je me suis installé à mon compte.
Avez-vous eu à un moment donné le sentiment d'être à la fois Espagnol, Français et Brestois ?
Il m'a fallu demander la nationalité française pour être artisan. Aujourd'hui j'ai la double nationalité. En Espagne, je suis le Français, en France c'est l'inverse. Mais le cœur est toujours espagnol. Je pense tous les jours à mon pays.
Quand s'est créé le Cercle franco-espagnol ?
En mars 1980. Son fondateur M. Caamano est décédé il y a peu. Au départ ils étaient une dizaine, essentiellement des Galiciens qui travaillaient dans le bâtiment.
Était-ce le moyen de ne pas oublier ses racines ?
Tout à fait. On parlait notre langue, on se tenait au courant de ce qui se passait au pays. On écoutait de la musique et une fois par mois, il y avait sangria et paella.
La musique, vous en faisiez aussi ?'
Oui, en 1986, j'ai créé un groupe qui s'appelait Amistad (amitié en français). Aujourd'hui un de mes fils a pris la relève avec le groupe Juanito Fuentes qui fait du flamenco et de la musique latine.
Où en est le Cercle aujourd'hui ?
Il y a 120 "socios" (adhérents) en tout, Français et Espagnols.
Quels sont vos liens avec la ville et ses habitants ?
On a participé à Brest 2008 et on ne rate pas les fêtes de la Rive Droite comme le Pardon de Kerangoff. Pour les grandes fêtes, nous faisons 400 à 500 tapas différents. Les adhérents, les amis et les gens du quartier y sont accueillis.
Vous ne regrettez pas la chaleur du climat espagnol ?
Je trouve qu'il fait trop chaud en Espagne. Depuis 48 ans, je suis habitué au climat brestois.
Au sein de la communauté espagnole de Brest, y a-t-il des envies de retour au pays ?
Avant oui, tout le monde voulait retourner en Espagne. Aujourd'hui non, nos enfants sont ici et se sentent français.
Le mot le plus beau de la langue française ?
Amitié.
De quoi êtes-vous le plus fier ?
De mes enfants. J'ai deux filles et deux garçons et je suis cinq fois grand-père.
Ce qui vous déplaît ?
Ne pas faire quelque chose qu'on s'était engagé à faire.
Quel est le trait principal de votre caractère ?
Autoritaire. Mais je l'étais davantage quand mes enfants étaient petits.
Votre principal défaut ?
J'en ai plein. J'ai du mal à pardonner quand c'est grave.
Votre idéal de bonheur ?
Avoir la santé, du travail, être bien avec sa famille et ses amis.
Ce que vous redoutez de perdre ?
Les miens.
Qu'aimez-vous partager avec vos amis ?
Tout ce qui est bien.
Quel est le personnage historique français ou non pour lequel vous avez de la sympathie ?
J'admire Juan Carlos, le roi d'Espagne.
Aujourd'hui êtes-vous davantage crêpe ou paella ?
J'en ai fait tellement que je n'apprécie plus la paella. J'aime bien les crêpes complètes.
Vin ou cidre ?
Vin !
Et Brest dans tout ça ?
Brest, c'est un endroit que j'aime, c'est ma deuxième ville. J'y ai vécu près de cinquante ans. Je l'aime beaucoup malgré la pluie. J'ai voyagé dans toute la région et c'est Brest que je préfère. Chaque année je retourne en Espagne et après trois semaines, j'ai hâte de revenir à Brest. L'an dernier, mes vacances c'était Brest 2008.
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