Elyette Noël-Dumas, trente ans de culture à Brest
Initialement publié sur le magazine de Brest métropole océane "Sillage" N° 121 - février-mars 2007
C'est dans une cité encore en reconstruction qu'Elyette Noël-Dumas arrive au printemps 1961. Originaire de Provence où elle a suivi des études classiques de danse et de violon, elle se plonge d'emblée dans la vie culturelle renaissante de la ville. Directrice de l'école de danse et musicienne au sein de l'orchestre symphonique de Brest, elle sera au coeur des grands événements culturels de la ville pendant près de trois décennies. Voici quelques-uns de ses plus beaux souvenirs.
La vie musicale à Brest dans les années 60
Avant guerre, l'École de musique était située rue d'Aiguillon. En 1961, elle occupait une longue baraque sombre face à l'hôpital Morvan. Jean Meyer, nommé en 1946, en était le directeur. Sous son impulsion fut créée l'association des concerts symphoniques brestois. Cet orchestre était composé à la fois de professionnels et d'amateurs. Les concerts avaient lieu au cinéma l'Omnia devant un public fidèle et enthousiaste. En 1966, l'orchestre fêta son centième concert avec le virtuose Pierre Sancan. En 1970, les musiciens amateurs durent céder leur place, la mort dans l'âme, certains professionnels jugeant qu'ils faisaient du tort à la profession.
La saison lyrique de 1962
La dernière saison lyrique datait de 1939 aussi, après plus de vingt années de silence, renouer avec cette tradition posa de nombreux problèmes. C'était sans compter sur la détermination du professeur de chant de l'École de Musique, Georges Le Coz. Une fois le feu vert de la municipalité accordé, toute la troupe du Théâtre de Rennes conduite par Pierre Nougaro arriva à Brest. On embaucha des musiciens brestois et des danseuses comme supplétifs. Les répétitions débutèrent au cinéma Omnia. La scène étant trop petite pour monter les décors, les techniciens durent rivaliser d'ingéniosité. La grande première eut lieu le 25 avril 1962 avec une représentation de la "Belle de Cadix". Le Printemps Lyrique" se poursuivit jusqu'au 31 mai. Le succès fut considérable mais cette prodigieuse aventure n'aura pas de suite et il faudra quelques années pour retrouver l'art lyrique à Brest.
L'auditorium de musique
L'auditorium a été inauguré en décembre 1964. Au départ, c'était un bel amphithéâtre mais le plateau n'était conçu que pour un orchestre de chambre! Il fallut l'agrandir pour y loger 50 musiciens. Le plus étonnant était l'énorme vide au-dessus de la scène, cet emplacement étant à l'origine conçu pour y placer les tuyaux d'un orgue qui ne prit jamais place. Brest avait enfin une salle adaptée, quoique modeste, pour produire des orchestres philharmoniques.
Le Bal des débutantes
En octobre 1965, l'amiral Amman est sur le point de quitter Brest. Jouissant d'une réputation rayonnante sur la ville, son départ coïncide avec l'inauguration du Cercle Naval. Comme cadeau d'adieu, Elyette Noël-Dumas propose à Mme Amman d'organiser le Bal des Débutantes. Entre compromis, intrigues et intimidations, elle se retrouve alors avec 160 danseurs au lieu des 20 prévus au départ à qui il faut apprendre la révérence et la valse en un temps records ! La soirée se déroula dans la plus parfaite harmonie. Une plaque commémorative bien visible dans le hall d'entrée du Cercle Naval perdure le souvenir de cet événement unique en son genre à Brest.
Le Festival international des cornemuses
Créé en 1953, ce festival était l'une des plus grandes fêtes folkloriques d'Europe. Tous les spectacles étaient présentés en plein air face au château de Brest dans un cirque de 15 000 places. Les soirées du vendredi et du samedi, rehaussées par l'embrasement des remparts, étaient consacrées au folklore étranger. Le samedi après-midi donnait lieu au Championnat de Bretagne des bagadou, manifestation au cours de laquelle 200 sonneurs se mesuraient en vue d'un classement qui les cataloguait jusqu'à l'année suivante. Le dimanche voyait affluer la sélection des meilleurs cercles celtiques soit près de 3000 danseurs ! Le festival trouvait un final à sa grandeur dans un gigantesque défilé très impressionnant de 2000 sonneurs. Devant la pression des riverains gênés par le bruit, la municipalité supprima cet événement de son calendrier !
Le Palais des Arts et de la Culture
Très attendu par les Brestois, le PAC est inauguré en 1970 et vient enfin palier la pénurie de salles de spectacles. Du premier étage, la vue imprenable sur le jardin Kennedy et surtout la rade éblouissait les visiteurs. Le PAC était ouvert tous les jours, même le dimanche avec des spectacles gratuits où un public très varié, des grands-mères "à tricot" aux enfants courant dans les couloirs, venait en nombre. Cela frôlait parfois la pagaille mais l'ambiance était bon enfant, vraiment unique. Les flammes reprirent aux Brestois ce lieu emblématique le 26 novembre 1981.
Les Jeux de vingt heures
En 1978, cette émission de télévision était extrêmement populaire. Les camions de FR3 faisaient le tour de France et chaque soir faisaient la promotion d'une ville et de sa région. Le maire et son conseil municipal devaient présenter leur cité devant plusieurs millions de téléspectateurs, une aubaine pour Brest, ville martyre et mal aimée. C'était une très bonne publicité ! L'installation des caméras fut faite place de la Liberté sous un beau soleil printanier. Les artistes locaux terminaient le spectacle. Pour l'occasion, l'école de danse prépara un ballet moderne pour enfants que le présentateur Yves Philippe félicita en direct au grand bonheur de sa conceptrice!
Le Théâtre de l'Arrache Coeur
En 1979, Olivier Bourbeillon est encore un bouillant jeune homme, créateur d'une troupe d'étudiants appelée "l'Arrache Coeur" et dont le rêve est de monter un spectacle collectif "L'usure... ou le temps d'un acteur". L'histoire raconte l'aventure d'un comédien qui s'échappe de la pièce dans laquelle il joue, le "Tueur sans gage" de Ionesco. Olivier Bourbeillon veut ici tenter un spectacle total avec une dizaine de comédiens donnant vie à 36 personnages. Y participe aussi les jeunes musiciens de l'école de musique, des danseurs et les élèves des Beaux-arts pour les costumes et l'audiovisuel. Le spectacle eut lieu au PAC devant une salle comble et remporta un beau succès. Très vite Olivier Bourbeillon quitta les planches et Brest pour aller faire son "cinéma".
Olivier Polard pour Sillage.
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